mardi 28 juin 2011

Haïti, histoire, géopolitique et reconstruction vues par quelques experts

Amies et amis internautes,

Voici quelques vidéos qui méritent d'être vus:

1) Haiti's history ang geopolitics by Dr Maghan Keita, Villanova University, September 24, 2010; 51 min 06 sec.

2) A history of Haiti's poverty by Jean Casimir at CLAS, NYU, March 10, 2010; 36 min 46 sec.

3) The US role in Haiti's destruction by Noam Chomsky, (2010 ?) 1h 27 min 45 sec.

4) Former US President Bill Clinton talks at the World Economic Forum, Davos, Switzerland, January 27, 2011; the first 11 minutes of the 57 min 45 sec length.

vendredi 24 juin 2011

Haiti-Reconstruction : Reconstruire avec et pour les Haitiens

P-au-P, 21 juin 2011 [AlterPresse] --- Le Groupe de Réflexion et d’Action pour une Haiti Nouvelle (Grahn), plaide en faveur d’une reconstruction fondée sur les intérêts du pays rejette tout processus basé sur l’assistanat.

« Il faut reconstruire Haïti avec et pour les Haitiens », déclaré le professeur Samuel Pierre, président de Grahn-Monde, durant une cérémonie de lancement, ce 21 juin, du chapitre Haïti du Grahn et la présentation d’un ouvrage collectif baptisé « Construction d’une Haïti nouvelle – vision et contribution du Grahn ».

« Pour reconstruire Haiti cela prend un plan stratégique axé sur des réflexions à moyen et à long terme », souligne le professeur, alors que le flou persiste sur le processus de reconstruction d’Haiti, terriblement frappé par le séisme du 12 janvier 2010.

La branche Grahn-Haiti se donne pour mission de faciliter un « renforcement de la capacité de l’État à répondre à ses responsabilités » ainsi que celle de la société civile, de sorte que le pays soit « capable, à un certain horizon (…) de se prendre en main », précise le professeur Samuel Pierre.

« Il faut faire que cette Haiti puisse se passer de l’assistanat », préconise-t-il, en présentant le contenu du livre de 600 pages, soit 10 chapitres, écrit par 125 auteurs haïtiens vivants à l’étranger et en Haïti.

Cet ouvrage renferme 175 propositions, 150 recommandations et 25 projets « structurants », dont les réalisations sont définies dans le temps, indique Pierre.

Ces projets ont, en substance, pour objectif de projeter l’ancienne perle des Antilles vers la modernité en répondant aux différents défis auxquels le pays est confronté, soit la sous-éducation chronique, l’inaccessibilité aux soins de santé de base, un taux de chômage élevé, la perte du contrôle démographique et l’incapacité de créer de la richesse.

Le premier ministre désigné, Gérard Daniel Rouzier, qui assistait à la cérémonie, affirme sa volonté de prendre en considération les propositions du Grahn, si jamais il est ratifié par le parlement haïtien. (*)

De son coté le recteur de l’Université d’Etat haïtien (UEH), le professeur Jean Vernet Henry, estime que cette initiative est un « signal de changement … » un pas « pour sortir Haïti du désastre généralisé ».

Le GRAHN est une organisation mondiale qui regroupe plusieurs centaines de professionnels, d‘experts et de citoyens haïtiens, de l’intérieur et de l’extérieur, ainsi que des amis d’Haïti.

Créé officiellement le 20 janvier 2010, son but principal est de permettre une mise en œuvre des forces vives du pays à travers le monde, au bénéfice d’Haiti.

Ses membres nourrissent le rêve de faire d’Haiti, un pays émergent d’ici 2030.
[rh gp apr 21/06/2011 15 :15]
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(*) NDCDP-Politique.- Par un vote pris à main levée en fin d'après-midi du 21 juin, la Chambre des députés, a rejeté la candidature de M. Rouzier au poste de Premier ministre par 42 voix contre, 19 contre et 3 abstentions.

mardi 21 juin 2011

Haïti/Rapport commission parlementaire spéciale ayant examiné le dossier du PM désigné Pierre Gérard Daniel Rouzier

Source: scribd.com, 20 juin 2011


RAPPORT DE LA COMMISSION PARLEMENTAIRE SPECIALE CHARGEE D’EXAMINER LE DOSSIER DE MONSIEUR PIERRE GERARD DANIEL ROUZIER, PREMIER MINISTRE DESIGNE

15 Juin 2011

I. MISE EN CONTEXTE

Apres l’installation du nouveau Président élu à la tête du pays et l’entrée en fonction de la 49ème Législature la constitution exige la désignation, par celui-ci, d’un nouveau chef de Gouvernement et la formation d’un cabinet ministériel en vue du vote de confiance des deux Chambres sur la déclaration de politique générale du Premier Ministre. Ces impératifs de la Constitution de 1987 découlent de son préambule qui postule « l’implantation de la démocratie sur fond de pluralisme idéologique et d’alternance politique » dans le but « d’assurer la séparation et la répartition harmonieuse des Pouvoirs de l’Etat au service des intérêts fondamentaux et prioritaires de la Nation ».

Dans ces circonstances politiques, le nouveau Chef de l’Etat, son Excellence, Monsieur Michel Joseph MARTELLY, en consultation avec le Président du Sénat, l’Honorable Sénateur Jean Rodolphe JOAZILE, et le Président de la Chambre des Députés, l’Honorable Député, Saurel JACINTHE, a, par lettre datée du 19 mai 2011, « confirmé le choix de Monsieur Daniel Gérard ROUZIER comme Premier Ministre pour conduire la politique de son Gouvernement ». Par la même lettre, le Président de la République a convié les Présidents des deux Chambres à entamer « la procédure parlementaire de ratification du choix du Premier Ministre pour la mise en place du Gouvernement ».

Ainsi, se basant sur les articles 98, 102, 103, 104, 130, 134, 135, 137, 152, 153, 155, 156, 156.1 de la Constitution, rappelant la démission du Gouvernement BELLERIVE, et au constat de la vacance parlementaire au niveau de la Chambre des Députés, le Chef de l’Etat a, par message daté du 20 mai 2011, « convoqué le Corps législatif en session extraordinaire en vue de ratifier le choix du Premier Ministre désigné et recevoir l’énoncé de sa Déclaration de politique générale ».

Donnant suite à cette décision présidentielle, conformément aux prescrits constitutionnels et suivant la procédure parlementaire y afférente, la Chambre des Députés, réunie à l’extraordinaire le Juin 2011, a mis en place, sur le fondement de l’article 50 du règlement intérieur, LA COMMISSION SPECIALE CHARGEE D’EXAMINER LE DOSSIER DE MONSIEUR DANIEL GERARD ROUZIER, PREMIER MINISTRE DESIGNE dont la composition et le mandat sont ci-après définis.

II. DE LA COMPOSITION ET DU MANDAT DE LA COMMISSION PARLEMENTAIRE SPECIALE

La composition de la Commission Parlementaire Spéciale chargée d’examiner le dossier du Premier Ministre désigné reflète le pluralisme politique de la Chambre des Députés dont l’article 50 du Règlement intérieur dispose :

« Les membres de la Commission Spéciale sont désignés par le Bureau sur proposition des Présidents de Groupe et en tenant compte de la configuration politique de l’Assemblée. Les Députés indépendants font individuellement acte de candidature auprès du Président de la Chambre des Députés ».

Le mandat de la Commission consiste à analyser et a vérification l’ensemble des pièces et document nécessaire au dossier du Premier Ministre désigné à la lumière des prescrits intangibles de la Constitution, des conventions internationales signées, ratifiées et des lois de la République en vue d’apprécier leur recevabilité et leur conformité aux exigences normatives internes.

III. DES CONDITIONS DE RECEVABILITE DU DOSSIER DE MONSIEUR DANIEL GERARD ROUZIER

La Constitution, en son article 157, prescrit les critères fondamentaux et intangibles pour être Premier Ministre. Elle dispose ainsi : Pour être Premier Ministre, il faut : • Etre Haïtien d’origine et n’avoir jamais renoncé à sa nationalité ; • Etre âgé de trente (30) ans accomplis ; • Jouir de ses droits civils et politiques et n’avoir jamais été condamné à une peine afflictive et infamante ; • Etre propriétaire en Haïti ou y exercer une profession ; • Résider dans le pays depuis cinq (5) années consécutives ; • Avoir reçu décharge de sa gestion si on a été comptable des deniers publics.

L’analyse des pièces soumises par le Premier Ministre désigné, au regard des cinq premiers critères définis à l’article 157, et étant entendu que celui-ci n’a pas été comptable de deniers publics, a révélé ce qui suit :

1. De la qualité d’Haïtien d’origine / de la non renonciation à sa nationalité Monsieur Daniel Gérard ROUZIER, né à Port au Prince le 15 septembre 1960, des œuvres légitimes de monsieur Pierre Emile Gérard ROUZIER et de Joseph Alice Marie Hélène BRUN, est haïtien d’origine puisque né de père et de mère haïtien qui eux-mêmes, descendants respectifs de monsieur Pierre Raoul ROUZIER et de Georgette Odéïde, d’une part, de Daniel BRUN et de Madeleine BORNO, d’autre part, sont nés haïtiens conformément à l’article 11 de la Constitution haïtienne. La Commission Spéciale, à propos de l’impératif de la « non-renonciation à la nationalité haïtienne » tant par Monsieur ROUZIER, que par ses père et mère, ne dispose pas d’éléments suffisants pour vérifier si ces derniers au moment de la naissance de monsieur Daniel Gérard ROUZIER, n’avaient pas renoncé à la nationalité haïtienne. Il en est de même pour Daniel Gérard ROUZIER qui, suivant les documents d’état civil fournis, est né haïtien. En fait, rien dans le dossier ne permet d’établir que le Premier Ministre désigné, ainsi que ses père et mère aient, à un moment de leur vie, renoncé à la nationalité haïtienne.

2. De l’âge requis pour être Premier Ministre Pour avoir pris naissance le 15 Septembre 1960 et pour être âgé de cinquante (50) ans et neuf (9) mois, Monsieur Daniel Gérard ROUZIER répond au critère de l’âge requis par l’article 157.2 de la Constitution en vue d’occuper la fonction de Premier Ministre du Gouvernement.

3. De l’exercice des droits civils et politiques La radiographie du dossier de monsieur Daniel Gérard ROUZIER a également révélé que ce dernier jouissait pleinement de ses droits civils et politiques puisqu’il dispose, d’une part, d’un certificat de casier judiciaire daté du 23 mai 2011, délivré par le Greffe du Tribunal de Première Instance de Port au Prince, attestant qu’il n’a jamais été l’objet de condamnation correctionnelle ou criminelle et, d’autre part, d’un certificat daté du 7 juin 2011, délivré par le Bureau de Renseignements Judiciaires (BRJ) de la Direction Centrale de la Police Judiciaire précisant que le premier Ministre désigné n’est pas recherché par la Police nationale d’Haïti. Figurent à son dossier, sa carte d’identification nationale (CIN), émise le 7 septembre 2005, portant les numéros : 01-01-99-1960-09-00191 et sa carte d’identité fiscale, expirée le 24 Mars 2007, portant le numéro : 003-023-637-8. Le dossier de monsieur Daniel Gérard ROUZIER semble donc conforme aux prescrits de l’article 157.3 de la Constitution.

4. De l’exercice du droit de propriété ou d’une profession Le Premier Ministre désigné jouit du statut de propriétaire à raison d’un titre de propriété, passé au rapport du Notaire GARRY BRISSON CASSAGNOL en date du 30 Mars 2006 attestant l’acquisition, faite par lui, des sieurs et dame Jacques D. BRUN, Louis Daniel BRUN et Marie Hélène BRUN, d’un terrain d’une superficie de 1547 mètres carrés, sis à Pétion Ville, dépendant de l’habitation Berthé. En outre, le Premier Ministre désigné a exercé les fonctions de Président Directeur Général de la Société anonyme E-power et celle de Président du Conseil d’Administration de la Sun-Auto S.A. Ceci atteste la conformité de son dossier au prescrit de l’article 157.4 de la Constitution.

5. L’obligation de résider dans le pays depuis cinq années consécutives

En réponse à l’exigence de résidence dans le pays depuis cinq années consécutives, le dossier du Premier Ministre désigné comprend un acte de notoriété délivré par le Juge de Paix de Pétion-Ville, ainsi qu’un certificat de résidence daté du 9 Juin 2011 émis par la Présidente du Conseil Municipal de Pétion ville, Madame Claire Lydie PARENT, attestant que monsieur Daniel Gérard ROUZIER demeure dans la Commune de Pétion-Ville, au numéro 105 de la rue Daniel Brun, Pétion-Ville, Haïti.

Si ces documents peuvent manquer de force probante, le Premier Ministre désigné a également soumis à l’appréciation de la Commission Parlementaire Spéciale, deux passeports délivrés par l’Etat haïtien, portant les numéros PP1815940 et PP2467869. On y remarque des visas chinois, Schengen et des Territoire d’Outre-mer français. L’absence de visas américains et le constat de sceaux d’entrée et de sortie de l’Immigration américaine, semblent indiquer que le Premier désigné serait un résident américain, ce qui pourrait constituer un accroc à l’article 157.5 de la Constitution haïtienne.

Toutefois, le premier Ministre désigné peut bien posséder la qualité de « résident américain » et résider en fait, c’est-à-dire effectivement, en Haïti. Une analyse minutieuse de ses sorties et rentrées, à partir de son passeport, confirme sa situation de résident de fait dans le pays pendant cinq années consécutives, sous réserve de données contraires que pourrait fournir la Direction de l’Immigration et de l’émigration du Ministère de l’Intérieur et des Collectivités Territoriales.

IV. RESERVES

L’examen des exigences posées par l’article 157 de la Constitution concernant la désignation du Premier Ministre, révèle que le dossier du Premier Ministre désigné est recevable.

Toutefois, la Commission parlementaire spéciale émet des réserves ; les déclarations sur le fait que Mr Rouzier devrait être ratifié sans aucun doute par les deux Chambres reposent sur le sentiment que l’analyse des pièces fournies serait la seule mission des membres de la commission. Bien qu’a un niveau également certaines explications devraient être fournies : (par exemple pourquoi le montant des impôts payer par Mr Rouzier est si bas au vu de ses revenues supposes dans le pays, absence de CFPB pour les années 2007, 2008, 2009, comme il dit qu’il était propriétaire d’une maison détruite en 2010 par le séisme du 12 janvier, absence de la traduction de la lettre de nomination comme consulte honoraire de la Jamaïque, absence de contrat de vente d’énergie de E-Power a l’état Haïtien, absence de preuve de revenue annuelle ?), il est donc clair que le processus de ratification va au-delà d’une simple vérification de pièces. En lisant le Curriculum Vitae de monsieur Daniel Gérard Rouzier, Premier Ministre désigné par son Excellence le Président de la République, Monsieur Joseph Michel Martelly, plusieurs éléments ont conduit les membres de la commission à évoquer la possibilité d’insurmontables conflits d’intérêt aussi bien au niveau politique, social qu’économique.

Conflit d’intérêts au niveau politique

Il apparait que Monsieur Daniel Gérard Rouzier, en référence de la lettre du Premier Ministre et ministre des affaires étranger et d’échange l’Honorable Dr Kenneth O. Baugh de la Jamaïque en date du 14 May 2010 Réf. 202/801/65 a stipuler que ‘‘ We look forward to working with you in the years ahead, and we are confident that during your tenure, you will defend and promote to the best of your ability, the interests of Jamaica in Haiti ”. Quelles sont les relations entretenues avec la Jamaïque ou les Jamaïcains qui justifieraient ce choix. En référence à l’article 13.2 de la Constitution. Il est acquis que les pièces soumises, notamment l’acte de naissance, les différents livrets de passeport, les cartes d’immatriculation fiscale et d’identification nationale attestent de la nationalité d’origine du sieur Gérard Daniel Rouzier. Elles ne permettent pas, en revanche, d’établir s’il n’a jamais été en situation de perte de sa nationalité.

Conflits d’intérêts au niveau social

Monsieur Daniel Gérard Rouzier représenté l’archétype de la bourgeoisie élitiste. Au-delà de son engagement pour les plus pauvres (Food for the poor) pense-t-il pouvoir représenter cette classe moyenne qui a été la pricipale victime des desastres qui ont frappe Haiti depuis plus de 3 ans et certainement la meilleure opportunite de relance de notre économique. Certains voient la classe sociale qu’il représente comme étant le principal obstacle au développement d’une classe moyenne forte car elle contrôle tous les leviers économiques et financiers. D’ailleurs, durant les vingt dernières années, cette classe sociale a été intimement associée aux différents reversements de l’ordre démocratique. Comment se situe Monsieur Daniel Gérard Rouzier face a ce positionnement idéologique « le pouvoir aux plus capables » ? Conflits d’intérêts au niveau économique

Monsieur Daniel Gérard Rouzier est l’un des principaux actionnaires d’une compagnie qui annonce vouloir investir plus de 59.3 millions de dollars américain en Haïti. Il se trouve que pour l’instant, l’état haïtien est le seul et unique client de cette compagnie d’énergie électrique. Monsieur Daniel Gérard Rouzier annonce qu’il aurait démissionne du conseil d’Administration de E-Power. Nous prenons acte de la lettre, mais peut-il nous prouves qu’il a vendu la totalité de ses actions (à qui dans l’éventualité positive) ? Enfin, il serait important que nous connaissions les noms des autres actionnaires de cette compagnie afin de nous assurer qu’il n’y aura pas de conflits d’intérêts dans les marches publique. Par ailleurs, il est bruit que de nombreux entrepreneurs ont intégré l’équipe économique de Mr Rouzier, quelle garantie que le e le Premier Ministre désigné peut nous donner afin d’éviter qu’il n’y aura pas de favoritisme ou d’échanges d’informations confidentielles pour les futurs appels d’offres ?

Sous ce rapport, des zones d’ombre subsistent, quant à la fonction de consul honoraire de la Jamaïque auprès de l’Etat haïtien exercée par M. Pierre Gérard Daniel Rouzier, poste pour lequel il a remis sa démission au Vice-ministre des affaires étrangères jamaïcain. En effet, les dispositions de la Convention de Vienne spécifiques au rôle du Consul honoraire, notamment les articles 1er al. 3, 67, 68 et 71, font état tant d’immunité de juridiction que d’inviolabilité personnelle en relation avec cette position officielle. L’exercice de la fonction consulaire honoraire demeure ainsi sujet à interprétations diverses quant à son caractère administratif ou politique.

Face au doute qui peut donc être entretenu sur la nature du poste occupé par M. Rouzier, la Commission estime qu’il y aurait lieu d’apprécier si dans l’exercice effectif de ses fonctions, le Premier Ministre désigné a posé des actes ayant une portée politique, pour le compte du Gouvernement Jamaïcain, et de nature à porter atteinte aux intérêts supérieurs de la nation haïtienne Il reste que la sanction de déchéance de nationalité relevant, selon le décret du 6 novembre 1984 sur la nationalité, de la compétence du Président de la République qui l’exerce par arrêté, la Commission n’a pas qualité pour se prononcer, par voie d’autorité, en la matière.

V. RECOMMANDATIONS

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NDCDP-Politique.

Comme on le verra dans le document posté sur scribd.com, il n'y a pas de recommandations dans le rapport de la commission parlementaire. La rubrique Recommandations contient un ensemble de 19 traits continus (des "blanks"). Il semble donc que la commission n'ait fait aucune recommandation à l'Assemblée des députés comme cela a été largement rapporté dans la presse.

Cependant, le document posté par haiti-info.com (1) contient des recommandations défavorables à Daniel Rouzier et qui s'adressent également, bizarrement, directement au Président Martelly:

«La nomination d’un Premier Ministre va donc bien au-delà d’une simple analyse de pièces et de l’expose de sa politique générale. Il nous semble que les conflits d’intérêts qui existe a différents niveaux ne nous permettent pas de recommander a l’assemblée de ratifier le choix de Mr Daniel Gérard Rouzier pour le poste de chef de gouvernement, a moins de considérer que l’élection du Président Joseph Michel Martelly l’exonéré de l’obligation de choisir un Premier Ministre qui soit libre de redevances envers des particuliers, des institutions, des entreprises ou de pays étrangers. Nous demandons donc au Président Joseph Michel Martelly de soumettre le plus rapidement possible aux Présidents des deux Chambres le nom d’une autre personne qui puisse, sans conflits d’intérêts majeurs, occuper cette fonction. Comprenant l’urgence de la mise en place d’un nouveau gouvernement


D'autre part, la version lue à la séance du 20 juin se termine par des recommandations correspondant à celles rapportées par Alterpresse (2):

«Tenant compte des réserves formulées par la commission parlementaire spéciale en ce qui concerne des zones d’ombre que recèle le dit dossier, les neuf commissaires, soussignés, députés du peuple de la 49e législature, recommandent à l’Assemblée des députés de statuer souverainement sur la ratification du choix fait par le président de la République».

Il existerait donc au moins trois versions du rapport de la commission spéciale. En ce qui a trait aux recommandations, laquelle des trois versions a été signée par les membres de la commission et remise à l'assemblée des députés ? Celle qui a été lue à la Chambre et diffusée en directe dans les médias et rapportée par Alterpresse serait la bonne version du rapport de la commission spéciale.
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(1) haiti-info.com.

(2) alterpresse.org.

jeudi 16 juin 2011

Haïti/Les trente premiers jours de présidence de Michel Martelly

Amies et amis internautes,

Voici un vidéo dans lequel le Président Martelly présente le rapport de ses trente premiers jour à la tête du pays.

Compliments, Monsieur le Président.

Martelly/ 30 day report, youtube , 7 min 42 sec

mercredi 8 juin 2011

Haïti/Début présidence Martelly/Entrevue du Professeur Gérard Bissainthe

Source: Présence haïtienne, revue haïtienne fondée à New York par Gérard Bissainthe en 1970.

Date: 1er juin 2011


Présence Haïtienne (1)
Professeur Bissainthe, cela fait très longtemps que vous n’êtes pas intervenu sur le Web. Vous vous retirez sous votre tente? Vous prenez du recul?


Gérard Bissainthe
Je me suis seulement imposé un temps de silence depuis le résultat des élections.


Présence Haïtienne
Ces élections ont donc été si importantes?


Gérard Bissainthe
Oui importantes surtout par le sens qu’elles ont en elles-mêmes. Depuis 1994, en effet, ce qui a été au pouvoir en Haïti c’est ce que beaucoup appellent la Gauche et que je préfère appeler la Gogauche. Pour la première fois depuis ces élections c’est un citoyen lambda, sans appartenance idéologique qui tient les rênes du pays. Cela constitue un changement qualitatif dans notre politique haïtienne. La Gogauche est morte.


Présence Haïtienne
Qui l’a mise à mort? Le nouveau président?


Gérard Bissainthe
Selon les apparences oui. Mais c’est plus profond que cela. D’ailleurs le nouveau président n’a pas livré une guerre ouverte à la Gogauche et son but n’a pas du tout été de la détruire. Disons qu’à la faveur des circonstances il a pris le navire à l’abordage.


Présence Haïtienne
Un coup d’Etat?


Gérard Bissainthe
Pour qu’il y ait coup d’Etat il faut qu’il y ait Etat. Comme depuis longtemps Haïti est sous tutelle, l’Etat dans ce pays est devenu une fiction juridique. Dans le “mangé-chin”, le “lucha libre” électoral auquel nous assistions depuis plusieurs mois le nouveau président s’était montré le plus “bandit” et il l’a emporté.


Présence Haïtienne
Ça vous satisfait?


Gérard Bissainthe
Satisfait serait un bien grand mot. Je ne suis pas masochiste.
Leu ou pa gain maman ou tété gran’n.
Il faut faire avec. Mais sans se bercer d’illusions.


Présence Haïtienne
Vous aviez écrit des choses très positives sur le candidat Sweet Micky devenu aujourd’hui président.


Gérard Bissainthe
Je les assume aujourd’hui encore. Il avait et a beaucoup d’atouts.
Le premier pour moi est qu’il a toujours été pour l’Armée indigène, à la différence de tous les soussous commandités de la Gogauche.
De plus, il parlait et parle beaucoup de langues:
1.- Il parlait et parle très correctement notre “parler haïtien existentiel” qui est un mélange pendulaire et ondulatoire de créole et de français: en effet, dans le même discours, le même paragraphe ou parfois la même phrase l’Haïtien normal passe constamment de l’un à l’autre sans aucun complexe et sans état d’âme. D’où l’absurdité de deux orthographes, l’une pour le français, l’autre pour le créole, alors qu’il s’agit de la même langue existentielle. Seuls les linguistes se forcent à parler et veulent imposer un créole prétendument intégral, mais qui est factice, ennuyeux, cabalistique, casse-pied et qu’ils prétendent originaire de Trou-lou-cou-cou.
2.- Il parlait et parle l’anglais qui est aujourd’hui la langue dominante dans le monde, y compris en France.
3.- Il parle sans doute l’espagnol
4.- Il parle la langue dite verte où les gros mots abondent et dans laquelle en France un Rabelais, grand humaniste, était passé maître.


Présence Haïtienne
Cette langue verte ne vous choque pas


Gérard Bissainthe
Si dans ma jeunesse j’avais utilisé le centième du langage pré-électoral et électoral de Sweet Micky devant ma mère, j’aurais reçu d’elle une “kal” magistrale dont j’aurais gardé un souvenir cuisant et éternel. Mais ma sainte mère est certainement aujourd’hui au ciel et nous sommes sur terre.
Il n’y a qu’une langue que ce candidat ne parlait pas, c’était la langue de bois.
Il était ouvert à tous, ne cherchant pas à faire l’ange pour aboutir à faire la bête. Bref l’antithèse de la Gogauche.


Présence Haïtienne
Ne craignez-vous pas qu’on dise demain que c’est vous qui l’avez dédouané.


Gérard Bissainthe
Avait-il besoin d’être dédouané? Après les élections de 1988, un jeune journaliste talentueux m’avait une fois interpelé bruyamment en public en ces termes: “Bissainthe, ça ou fait a pas bon. Sé ou qui dédouané Manigat.” J’avais effectivement, après son élection très controversée, demandé haut et clair, urbi et orbi qu’on se rallie à Manigat. Si on me reproche des dédouanages et qu’en réalité je mérite ces reproches, je les assume.


Présence Haïtienne
Mais qu’est-ce qui a changé avec la nouvelle présidence?


Gérard Bissainthe
Deux principes fondamentaux sont maintenant réellement acquis:
1.- le retour de l’armée indigène en lieu et place de l’armée étrangère (la Minustah), ainsi que l’exige l’essence même de la nation haïtienne définie à la proclamation de son indépendance en 1804 comme une nation libre et souveraine, ce qui implique que sur le territoire de la République d’Haïti la possession et l’usage de la forcée armée est un privilège exclusif des Haïtiens et de leurs représentants. Toute force armée étrangère, quelle qu’elle soit, sur le territoire d’Haïti est illégale et constitue un viol de la souveraineté nationale.
2.- Le reconnaissance de l’irrévocabilité, de l’indestructibilité naturelles en quelque sorte de la citoyenneté haïtienne d’origine qui résiste à toute citoyenneté secondaire obtenue par naturalisation, sauf en cas de renonciation explicite et formelle à cette citoyenneté haïtienne d’origine.


Présence Haïtienne
D’autres candidats acceptaient aussi ces principes.


Gérard Bissainthe
Mais seulement du bout des lèvres. Il était le seul des candidats à s’être trouvé dans le même camp que moi, à l’époque où je défendais la cause de la souveraineté nationale et de l’Armée Nationale en particulier dans mon journal LA NATION, avec des personnes courageuses, voire héroïques, comme feue Me Mireille Durocher Bertin, feu Dr Gérard Etienne, Carl Denis heureusement encore en vie après les ignobles vexations d’une prison où il fut maintenu sans aucun chef d’accusation, et bien d’autres auxquels je rends hommage ailleurs. En ce temps quasiment tout le monde crachait sur l’Armée, bouc émissaire de tous nos maux, ce qui automatiquement veut dire que presque tout le monde en ce temps demandait à cor et à cri et à genoux que des soldats étrangers viennent chez nous accomplir le “White Man’s Burden” de nous civiliser.


Présence Haïtienne
Maintenant que Michel Martelly est devenu président, que pensez-vous de lui?


Gérard Bissainthe
Tout d’abord j’avais tenu à dire, lorsque je soutenais sa candidature, que je n’avais demandé ni obtenu aucune garantie de sa part. Je ne suis lié que par moi-même. Etant de ceux qui ont aidé, peu ou prou, à mettre le satellite gouvernemental sur orbite, je ne peux être indifférent à son sort. S’il échoue, ce sera aussi un peu mon échec. Je ferai pour lui ce qu’en 1986 je recommandais à tous de faire pour le CNG dirigé par le General Namphy, à savoir de lui apporter appui et critiques positives.


Présence Haïtienne
Vous appuyez donc ce Gouvernement?


Gérard Bissainthe
Oui. Et nous devrions tous le faire. Ceux qui veulent repartir pour un “raché man-yoc” sont des irresponsables.


Présence Haïtienne
Que pensez-vous de certaines critiques qui lui sont faites?


Gérard Bissainthe
Lesquelles ?


Présence Haïtienne
Par exemple, on reproche au nouveau Président, d’être trop “chaud” dans le sens créole du terme, trop impatient d’agir.


Gérard Bissainthe
Il s’est justifié en disant qu’il devait rattraper le temps perdu du fait qu’il aurait dû être au pouvoir depuis le 7 février. Il me rappelle le Père Foisset, un de nos éducateurs spiritains méritants du College Saint-Martial dans la décennie 1940 qui commençait le premier cours de l’année scolaire en classe de Rhétorique par ces termes: “Prenez vos plumes. Prenez vos cahiers. Nous n’avons pas de temps à perdre: nous sommes en retard sur le programme.” Je n’aurais pas commencé comme lui. Mais chacun son style.


Présence Haïtienne
Qu’auriez-vous fait à sa place?


Gérard Bissainthe
Ayant beaucoup appris de ce maître exigeant, qui fait payer très cher ses leçons et qu’on appelle l’Expérience, j’aurais commencé par prendre mon temps, car le pays ne va pas se sauver. Et ses problèmes non plus; ce qui serait trop beau. Je n’aurais posé aucune action publique avant d’avoir mis sur pied mon propre cabinet, dût-il être purement officieux. Ce qui me dérange c’est que le Gouvernement annonce chaque jour des mesures, entreprend chaque jour des actions sans être encore effectivement et formellement à la barre du pays. Tous les actes que le Président pose actuellement devraient normalement être posés plutôt par son Premier Ministre. Comme le Premier Ministre doit être ratifié par un Parlement qui ne lui est pas acquis, un conflit se prépare et éventuellement un blocage gestionnel, au cas où un compromis ne peut être trouvé. D’ores et déjà le Président doit savoir sur quoi il va s’appuyer pour mener sa barque. Or voici les forces en présence:
a.- La Communauté Internationale
b.- L’Establishment
c.- Le Parlement
d.- Le peuple de la base, ce qu’en anglais on appelle les “Grassroots”.
Il faudrait ajouter une quasi force politique constituée par les Media. On remarquera que je n’ai pas mentionné l’Armée, car l’Armée n’est pas une force politique. L’Armée n’est qu’un outil incontournable, strictement au service d’une des quatre forces politiques ci-dessus mentionnées. Jusqu’ici Communauté Internationale, Establishment, Parlement ont fait bon commerce. Or le nouveau Président a été élu grâce au support du peuple de la base séduit par la flute d’Orphée, ce qui veut dire qu’il ne pourra gouverner qu’avec le peuple de la base. Il est ainsi menacé du même écueil, du même piège qui a fait tomber ou qui a paralysé Aristide: élu par le peuple, ce dernier a été prisonnier de l’Establishment, dont il a fait le jeu en supprimant lui-même l’Armée indigène, l’outil indispensable pour tenir en main l’Etat.


Présence Haïtienne
Que conseilleriez-au nouveau Président?


Gérard Bissainthe
Plutôt que de parler de conseils, je préfère faire une analyse qui vaut pour quiconque accède au pouvoir surtout la première fois. Au début la première sensation, je dis bien sensation, est que le pouvoir c’est la puissance. On croit qu’on peut tout faire et on ne comprend pas que ceux qui sont passés avant n’ont rien fait ou n’ont pas fait grand-chose, du moins selon son propre jugement. A la fin ou vers la fin on fait la constatation de ses limites et on dit comme De Gaulle dépassé par l’Affaire Ben Barka: “Le pouvoir c’est l’impuissance.”


Présence Haïtienne
Que pensez-vous du projet présidentiel de résoudre une fois pour toutes le problème de notre école primaire?


Gérard Bissainthe
C’est beau, noble, généreux, sympathique. La grande question est comment? Déjà nous sommes enlisés dans l’impasse d’un enseignement en créole qui est le sommet de l’obscurantisme. Alors qu’il faut armer nos masses de langues qui débouchent sur le savoir universel, comme le français, l’anglais, l’espagnol, en profitant de la faculté naturelle de l’enfant à absorber n’importe quelle langue entre 4 et 7 ans environ, passer son temps à l’initier à un créole qu’il connaît déjà, qu’il ne perdra jamais, c’est de la folie douce et une vraie conspiration pour maintenir les masses dans une médiocrité destinée à les empêcher d’aller faire concurrence aux enfants des élites économiques et sociales qui, elles, sont très vite multilingues et tiennent le haut du pavé dans notre nation et souvent même hors de notre nation. Les linguistes sont des criminels sociaux conscients ou inconscients. Il faut d’abord savoir quelle école primaire? Puis vient le problème de l’argent: qui va financer cette école primaire? Si ce doit être encore le “Blan”, forget it.


Présence Haïtienne
Vous auriez donc tendance à rejeter ce projet parce que trop ambitieux.


Gérard Bissainthe
Pas du tout. Il faut surtout l’axer sur la seule source d’argent national qui est encore quasiment inentamée: notre Diaspora.


Présence Haïtienne
Elle est déjà très sollicitée.


Gérard Bissainthe
Oui, mais à peine au dixième de ses moyens.


Présence Haïtienne
Le nouveau président se dit pour la Diaspora.


Gérard Bissainthe
Je le crois sincère lorsqu’il le dit. Il faut reconnaître que c’est sous sa présidence, coïncidence heureuse, que la multinationalité a fini par être acceptée dans un amendement constitutionnel, pour lequel le Ministère des Haïtiens Vivant à l’Etranger sous la houlette de son Ministre sortant Edwin Paraison s’est vaillamment battu.


Présence Haïtienne
Mais le nouveau Premier Ministre pressenti a annoncé qu’il allait mettre fin à ce Ministère des Haïtiens de l’Etranger. Vous devez vous-même ressentir cela comme la mort de votre propre bébé, car c’est vous qui avez conçu et mis sur pied le Commissariat Général des Haïtiens d’Outre-Mer, la première mouture du MHAVE.


Gérard Bissainthe
C’est exact. Le PM pressenti va un peu trop vite à l’ouvrage, à mon avis. S’il est, lui aussi, “en retard sur le programme”, cela laisse prévoir que son programme va être dévastateur. L’herbe risque de ne pas repousser sous les pas de son cheval. Supprimer le MHAVE, comme cela, d’un revers annoncé de la main, alors que la Diaspora maintenant citoyennement libérée, peut enfin donner sa mesure, serait, à mon avis, une grave erreur. Il faut plutôt le refondre, ce qui ne peut se faire qu’en concertation avec la Diaspora elle-même. A mon, avis, il faut laisser le statu quo, jusqu’à ce que cette concertation puisse être bien mûrie, bien ficelée et bien réalisée.


Présence Haïtienne
Que pensez-vous donc alors de ce PM pressenti?


Gérard Bissainthe
Je ne le connais pas. Ceux qui m’en parlent m’en disent plutôt du bien.


Présence Haïtienne
Certains veulent l’écarter des raisons dites constitutionnelles, du fait qu’il a été consul honoraire de la Jamaïque.


Gérard Bissainthe
Il y a des gens qui m’amusent. La solution de la Minustah équivalait en elle-même à mettre la constitution en petits morceaux et à l’enterrer. Sous prétexte de la sauver, bien sûr. Et voilà que devant un prétendu accroc, objet de contestation, à une Constitution zombifiée, ils se dressent toutes plumes dehors, le couteau entre les dents, pour défendre notre Charte Nationale qu’ils disent en péril. Jésus-Christ parlait de ceux qui avalent le chameau et filtrent le moustique. Quand le salut du pays est en jeu, il faut savoir faire passer l’esprit de la loi avant la lettre de la loi. Si le PM pressenti a les qualités requises pour faire le travail, nous devons l’accepter.


Présence Haïtienne
Alors la nouvelle présidence est-elle bien partie?


Gérard Bissainthe
Bien serait beaucoup dire. Mais au moins elle est partie autrement, décidée à explorer des champs nouveaux hors des sentiers battus des Gogauchards qui se sont fait une spécialité de l’exploitation du pire et de la distillation de l’ennui.


Présence Haïtienne
Votre pronostic?


Gérard Bissainthe
Il est trop tôt pour en faire un. Je les regarde encore courir.


Présence Haïtienne
Pourriez-vous nous parler la prochaine fois de votre conception de ce que doit être une nation?


Gérard Bissainthe
Très volontiers.


Présence Haïtienne
Merci, Professeur Bissainthe, pour avoir bien voulu répondre à nos questions.


Gérard Bissainthe
C’est à moi à vous remercier.


1er Juin 2011
www.presencehaitienne.com
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(1.-) Pour la commodité du discours je présenterai désormais certaines de mes interventions sous la forme d’une interview par “Présence Haïtienne” qui est une revue que j’avais fondée à New York en 1970. (Note de Gérard Bissainthe)

mercredi 1 juin 2011

Une actualité déconcertante et inquiétante pour l’état de droit

Par Mirlande MANIGAT
Secrétaire Générale du RDNP

J’ai été sollicitée pour m’exprimer sur l’actualité constitutionnelle du pays à un moment de dérive, d’atermoiements et d’incertitudes dans lequel ce qui est en jeu est la préservation de la Constitution de 1987, non dans sa pureté originelle, mais dans son rôle vigilant,et surtout le respect de cette base essentielle de la construction de l’état de droit qui ne souffre pas de compromissions au nom de la raison d’état qui est son contraire.

Je l’ai fait en créole sur des stations de radio, mais il me parait utile et opportun de produire mes analyses et d’exprimer mes préoccupations par écrit. Le langage parlé touche le plus grand nombre, mais l’expression écrite demeure comme témoignage d’une position et d’un engagement.

Pour la première fois depuis son adoption, la Constitution de 1987 est en train de subir une procédure d’amendement, initiée conformément à son Article 282 lors de la dernière session de la 48ème Législature, in extremis, le 14 septembre 2009 avant minuit. Un texte a été adopté qui sera publié dans Le Moniteur le 6 octobre. La 49ème Législature installée avec un retard considérable, mais dans les temps, a statué sur le texte le 9 mai avant minuit et l’a envoyé au Président de la République afin qu’il soit promulgué et publié, ce qui a été fait le 13 mai.

A partir de là,l’actualité s’emballe et la procédure est ballotée dans un bateau ivre où se sont multipliés de véritables "sauve qui peut". On a entendu plusieurs témoignages de parlementaires révélant, avec force détail et animés par une conviction pas toujours concordante, que le texte publié le 13 mai n’est pas celui qu’ils ont voté en Assemblée Nationale. Celui-ci souligne l’absence de sa signature réglementaire, celui-là attire l’attention sur des articles manquants, d’autres révèlent des prescriptions tronquées dans leur substance. Tout un cahier de charges verbales qui a troublé la conscience citoyenne mais aussi déclenché des dérives analytiques et des propositions de solution ahurissantes, quoique parfois sincères dans la volonté d’aider dans la recherche d’une solution, mais qui s’écartent des exigences du Droit, surtout s’agissant d’un texte fondamental comme la Loi-mère du pays qui réclame un minimum de respect. Le respect de la Constitution c’est ce qui me porte à livrer quelques réflexions même si,comme je l’ai maintes fois souligné, la Charte de 1987 présente de nombreuses lacunes qu’il est toutefois possible de combler mais en respectant les règles de procédure. Je rappelle aussi que ma proposition fondamentale va dans le sens de la préparation d’une nouvelle Constitution, mais lorsque le contexte national sera politiquement approprié. Mais j’ai toujours affirméque je n’avais aucune aversion méthodologique envers la procédure d’amendement s’appliquant à 10,20 ou, comme c’est le cas présentement, 128 Articles, à condition qu’on observe les principes et le chronogramme idoines.

J’ai travaillé avec 4 textes à partir de la Constitution de 1987 qui sert de référence :
 Les propositions d’amendement soumises par l’Exécutif, un document en trois colonnes, le premier rapportant la disposition constitutionnelle, le second le changement souhaité et le dernier la justification de la modification estimée souhaitable.
 Le texte voté séparément par la Chambre des Députés et le Sénat le 14 septembre 2009 avant minuit.
 La Déclaration correspondante publiée dans Le Moniteur le 6 octobre 2009.
 La Loi constitutionnelle parue dans Le Moniteur le 13 mai 2011 avec la formule sacramentelle de la promulgation par le Président de la République.

S’agissant de ce dernier texte que j’analyserai plus tard, si l‘opportunité se présente, je voudrais faire trois observations rapides.

La première concerne l’appellation d’Assemblée Constituante que l’Assemblée Nationale se serait accordée. En l’occurrence, il s’agit d’une Assemblée Nationale Constituante,car le titre précédentse justifie s’il s’agit de fabriquer une nouvelle Constitution et, le plus souvent, en dehors de l’enceinte parlementaire. Lorsqu’elle est dotée de pouvoirs constituants soit pour rédiger un nouveau texte, soit pour amender une charte en vigueur, le titre requis précisément par la fonction est bien Assemblée Nationale Constituante. Rappelons quedans notre histoire, 11 de nos Constitution, dont celle de 1987, ont été fabriquées par des Assemblées Constituantes, et 8 d’entre elles par des Assemblées Nationales Constituantes. Le produit fini dans un cas comme dans l’autre, détient la même valeur juridique. Ce n’est pas un détail car l’identification correcte de l’organe émetteur qualifie l’objet de l’intervention.

La seconde se rapporte à la dernière phrase "Le présent amendement après publication au Journal Officiel Le Moniteur entre en vigueur à l’ installation du futur Président de la République le 14 mai 2011".

Or,l’Article 284 de la Constitution précise "L’amendement obtenu ne peut entrer envigueur qu’ après l’installation du prochain président élu ".

La grammaire juridique est aussi de la grammaire et il se dégage une différence entre les deux conjonctions de temps qui ne sont pas interchangeables, car la première induitune immédiateté temporelle et même une coïncidence, tandis que la seconde établit undécalage qui va dans le sens voulu par la Constitution.

La troisième est plus importante et saute aux yeux dès la première page du texte publié dans Le Moniteur du 13 mai 2011. Elle concerne le label de Loi constitutionnelle octroyé au texte et qui suscite quatre commentaires critiques :
 La 49ème Législature a reçu de la précédente non un projet de loi mais une Déclaration telle que publiée dans Le Moniteur du 6 octobre 2009.
 La Constitution de 1987 ne requiert pas d’adopter des amendements sous forme de loi.
 L’Assemblée Nationale n’a pas dans ses attributions d’adopter des Lois. Il estinscritqu’elle peutprendre un décret pour ratifier les Traités et Conventions(Article 276-1), mais la Constitution ne lui reconnait pas une rérogative législative stricto sensu.
 Il existe toute une procédure d’adoption des lois à partir d’une compétence générique reconnue au Parlement dont il est dit qu’il fait des lois sur tous les objets d’intérêt public (Article 111). Mais plusieurs dispositions établissent l’itinéraire des lois, entre l’initiative, la navette d’abord bilatérale entre la Chambre et le Sénat qui doivent voter un texte dans les mêmes termes, puis triangulaire par l’obligation de solliciter et d’attendre les objections possibles du Président de la République lequel, en fin de parcours, promulgue la loi et l’envoie au Journal Officiel pour la rendre exécutoire. Il est donc impropre de parler de Loi constitutionnelle alors que cette procédure n’était pas de mise, ne se justifie pas et n’a pas été enclenchée. Et il convient de souligner que le Président de la République, en promulguant le texte envoyé au Moniteur, lui aussi, l’identifie comme telle, reprenant et confirmant ainsi l’anachronisme juridique.

A partir de ces documents de base, on peut reconstruire l’itinéraire de la pièce qui devait comporter et authentifier l’amendement. Mais plusieurs zones d’ombre demeurent, la principale étant le document transmis par le Président du Sénat et de l’Assemblée Nationale au Président Préval aux fins de promulgation. C’est le maillon manquant de la chaine et une pièce essentielle, la seule qui permettrait une minutieuse comparaison avec le texte du 13 mai pour repérer les erreurs, altérations de fond, en clair une manipulation. En son absence, il est logiquement et juridiquement impossible,en tout cas pas convaincant de révéler les points de différence ce qui permettrait de confirmer à coup sûr qu’il y a eu manipulation, dans quel sens et, peut-être, au profit de qui. Quelque crédibilité que l’on accorde à la parole de Députés et de Sénateurs qui crient au scandale, dont les propos sont largement repris par la presse parlée et écrite, elle ne constitue pas une preuve, même si elle oriente vers des probabilités surtoutpsychologiques. Ces propos vibrants de sincérité de parlementaires faisant appel à leur mémoire et non à leurs notes écrites ne sauraient fonder des arguments prouvant l’illégalité de la procédure et la caducité du texte publié le 13 mai.

Il revenait au Président de l’Assemblée Nationale, dès l’éclatement de la controverse,d’y mettre fin en publiant le document voté par l’Assemblée Nationale et transmis au Président de la République. Après tout, il parait logique de croire qu’il en a conservé une copie, sinon ce serait mettre en cause le sérieux avec lequel les choses ont été menées. Il ne s’agit pas, en l’occurrence, de fabriquer un rectificatif après coup, en corrigeant un texte publié car on pourrait douter de l’authenticité d’une initiative qui s’apparenterait plutôt à un rattrapage peu convaincant.

Incontestablement, il y a trois lieux possibles où l’intervention manipulatrice a pu être exécutée. Le premier est le milieu de l’Assemblée Nationale, mais est-ce le Président ou les membres du Bureau tout entier qui auraient agi dans la précipitation des dernières heures de la procédure ? Comment expliquer la disparition des Procès verbaux de la séance à partir desquels on pourrait retracer le fil des évènements, et qui en avait la garde ? Sommes-nous en présence d’un cas de désinvolture administrative ou faut-il soupçonner un geste délibéré? Restent les cassettes d’enregistrement télévisé de cette importante séance qui ne sauraient constituer des preuves intangibles,mais permettraient de révéler qui a dit quoi, quand et quel fut le résultat du vote article par article et à quel moment. On est en droit de se demander si ces documents ne se sont pas, eux aussi, volatilisés et sur ordre de qui.

Le second est la Présidence de la République : faut-il incriminer le Président René Préval, le Premier Ministre Jean Max Bellerive, les Ministres ou tous ensemble réunis et consentants pour mener à bien cette grave intervention ? Ils ont signé le texte envoyépar le Président de l’Assemblée Nationale et cautionné l’envoi au Moniteur. Ont-ils pris la peine de lire ce à quoi ils apposaient leur signature lui accordant ainsi un label d’authenticité et de légitimité, ou ont-ils, en la circonstance, fait confiance au Président qui, en signant le document, a dissipé les interrogations possibles ?

Reste un troisième espace, les Presses Nationales elles-mêmes pour fonder une possibilité technique à défaut d’un intérêt politique. La publication au Moniteur est soumise à des instructions reçues du Bureau du Premier Ministre ou du Ministère du Commerce. Sans en écarter l’hypothèse, une collusion avec des centres extérieurs pour effectuer les changements serait audacieuse et aussi dangereuse, car le Journal Officiel, en principe, ferme l’itinéraire d’un texte. Dans notre histoire, il est arrivé qu’un texte publié soit rappelé afin de corriger une erreur de transcription. On lit dans Le Moniteur le compte rendu de ces cas, rares au demeurant, où des parlementaires demandaient et obtenaient des rectifications au sujet de leurs déclarations mal rapportées ouqu’ils estimaient telles. Mais il s’agissait d’erreurs mineures et, à ces époques-là, le Parlement avait directement accès au Journal Officiel. En la circonstance, un tel rappel devrait être effectué par l’entité qui aura eu l’initiative du premier envoi, c’est-à-dire le Président Préval qui n’est plus en fonction. Et il n’est pas sans intérêt de souligner qu’un texte publié au Moniteur jouit du bénéfice de la présomption de légalité en ce sens que sa parution représente la dernière étape du chronogramme; mais une judicieuse controverse relativise ce caractère impératif car il suffirait d’inclure n’importe quel document dans le Journal Officiel pour lui attribuer une nécessité juridique. Ce qui demeure valide à cet égard, ce n’estpas la publication enelle-même mais le respect d’une procédure qui inclut la responsabilité de l’entité quiachemine les textes. Jusqu’à nouvel ordre, aucune rectification n’est venue de l’Exécutif quant à l’authenticité du document. On peut ainsi avancer l’hypothèse que, de son pointde vue, celui publié le 13 mai est bien la pièce qui a été acheminée, ce qui affranchit les Presses Nationales de toute responsabilité.

Ce n’est pas la police civile qui pourrait directement sanctionner ces manquements; elle pourrait seulement initier une enquête pour déterminer les responsabilités, mais elle devrait être requise de le faire et par qui ? Il ne faut pas oublier que les parlementaires jouissent de l’immunitéjuridictionnelle, sauf en cas de flagrant délit. Et il en est demême des membres du Pouvoir Exécutif. Mais comment, en l’occurrence, dans ces conditions de précipitation, établir la flagrance ? Ce cas relèverait plutôt de la Haute Cour de Justice car il s’agit bien d’une forfaiture qui resterait d’ailleurs à prouver; mais,faut-il le rappeler, le Président sortant n’est plus justiciable une fois qu’il a quitté le pouvoir et il serait hautement improbable d’obtenir le vote de 66 députés pour le mettre en accusation devant le Sénat érigé en Haute Cour de Justice. Les Ministres sont responsables des décisions du Chef de l’Etat, mais il faudrait identifier lequel d’entre eux aurait pris la lourde responsabilité de cette altération. Les parlementaires sont les seuls détenteurs du pouvoir d’état qui ne sont pas passibles de cette institution (Article186), ce qui est une anomalie. Dans notre histoire, il n’en a pas toujours été ainsi. La faculté de juger les responsables politiques est inscrite dans toutes nos Constitutions depuis 1806, et trois d’entre elles (1846, 1849, 1874) incluaient les parlementaires comme coupables possibles de forfaiture et de malversations. En les exemptant de toute poursuite devant la Haute Cour de Justice, la Constitution de 1987 n’anticipe pas qu’ils puissent errer dans l’accomplissement de leurs fonctions et leur accorde, avec l’inviolabilité et l’immunité, une totale impunité prospective.

Il est pénible d’anticiper que, malheureusement, comme cela se produit trop souvent,on va assister à une vaste opération de "kase fèy kouvri sa" et, par lassitude et une inertie collective consentie, le souci de préserver les acquis de la révision particulièrement en ce qui concerne la création du Conseil Constitutionnel dont l’intervention serait fort judicieuse en l’occurrence, les dispositions relatives à la nationalité si ardemment attendues de la part de nos compatriotes de l’extérieur, encore que certaines d’entre elles pourraient ne pas combler leurs espérances, on s’achemine vers un "kole piese" par lequel, contrairement à toutes les normes, on sortira prestement d’un chapeau une pièce rafistolée que l’onp résentera comme étant l’authentique votée le 9 mai,alors qu’il a déjà été révélé qu’elle a disparu. Pour comble, il se murmure qu’elle sera promulguée par le nouveau Président qui l’enverra au Moniteur…comportant la même date et revêtue des signatures apposées par l’équipe sortante ! Cet accroc, s’il se réalise au nom de la raison d’état, marquera un nouveau recul dans la construction de l’état de droit.

Je l’écris avec amertume et sans illusion, mais avec une inaltérable conviction en faveur du respect des normes: la seule solution acceptable capable d’assainir les bases juridiques de fonctionnement de l’Etat est de reconnaitre, courageusement, l’échec de la procédure d’amendement et de reporter celle-ci à la fin de la 49ème Législature, en prenant soin de respecter toutes les étapes requises. Ou alors créer les conditions pour organiser une Assemblée Constituante afin de préparer une nouvelle Constitution.

Mirlande H. Manigat
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Source: scribd.com.