Source: scribd.com, 20 juin 2011
RAPPORT DE LA COMMISSION PARLEMENTAIRE SPECIALE CHARGEE D’EXAMINER LE DOSSIER DE MONSIEUR PIERRE GERARD DANIEL ROUZIER, PREMIER MINISTRE DESIGNE
15 Juin 2011
I. MISE EN CONTEXTE
Apres l’installation du nouveau Président élu à la tête du pays et l’entrée en fonction de la 49ème Législature la constitution exige la désignation, par celui-ci, d’un nouveau chef de Gouvernement et la formation d’un cabinet ministériel en vue du vote de confiance des deux Chambres sur la déclaration de politique générale du Premier Ministre. Ces impératifs de la Constitution de 1987 découlent de son préambule qui postule « l’implantation de la démocratie sur fond de pluralisme idéologique et d’alternance politique » dans le but « d’assurer la séparation et la répartition harmonieuse des Pouvoirs de l’Etat au service des intérêts fondamentaux et prioritaires de la Nation ».
Dans ces circonstances politiques, le nouveau Chef de l’Etat, son Excellence, Monsieur Michel Joseph MARTELLY, en consultation avec le Président du Sénat, l’Honorable Sénateur Jean Rodolphe JOAZILE, et le Président de la Chambre des Députés, l’Honorable Député, Saurel JACINTHE, a, par lettre datée du 19 mai 2011, « confirmé le choix de Monsieur Daniel Gérard ROUZIER comme Premier Ministre pour conduire la politique de son Gouvernement ». Par la même lettre, le Président de la République a convié les Présidents des deux Chambres à entamer « la procédure parlementaire de ratification du choix du Premier Ministre pour la mise en place du Gouvernement ».
Ainsi, se basant sur les articles 98, 102, 103, 104, 130, 134, 135, 137, 152, 153, 155, 156, 156.1 de la Constitution, rappelant la démission du Gouvernement BELLERIVE, et au constat de la vacance parlementaire au niveau de la Chambre des Députés, le Chef de l’Etat a, par message daté du 20 mai 2011, « convoqué le Corps législatif en session extraordinaire en vue de ratifier le choix du Premier Ministre désigné et recevoir l’énoncé de sa Déclaration de politique générale ».
Donnant suite à cette décision présidentielle, conformément aux prescrits constitutionnels et suivant la procédure parlementaire y afférente, la Chambre des Députés, réunie à l’extraordinaire le Juin 2011, a mis en place, sur le fondement de l’article 50 du règlement intérieur, LA COMMISSION SPECIALE CHARGEE D’EXAMINER LE DOSSIER DE MONSIEUR DANIEL GERARD ROUZIER, PREMIER MINISTRE DESIGNE dont la composition et le mandat sont ci-après définis.
II. DE LA COMPOSITION ET DU MANDAT DE LA COMMISSION PARLEMENTAIRE SPECIALE
La composition de la Commission Parlementaire Spéciale chargée d’examiner le dossier du Premier Ministre désigné reflète le pluralisme politique de la Chambre des Députés dont l’article 50 du Règlement intérieur dispose :
« Les membres de la Commission Spéciale sont désignés par le Bureau sur proposition des Présidents de Groupe et en tenant compte de la configuration politique de l’Assemblée. Les Députés indépendants font individuellement acte de candidature auprès du Président de la Chambre des Députés ».
Le mandat de la Commission consiste à analyser et a vérification l’ensemble des pièces et document nécessaire au dossier du Premier Ministre désigné à la lumière des prescrits intangibles de la Constitution, des conventions internationales signées, ratifiées et des lois de la République en vue d’apprécier leur recevabilité et leur conformité aux exigences normatives internes.
III. DES CONDITIONS DE RECEVABILITE DU DOSSIER DE MONSIEUR DANIEL GERARD ROUZIER
La Constitution, en son article 157, prescrit les critères fondamentaux et intangibles pour être Premier Ministre. Elle dispose ainsi : Pour être Premier Ministre, il faut : • Etre Haïtien d’origine et n’avoir jamais renoncé à sa nationalité ; • Etre âgé de trente (30) ans accomplis ; • Jouir de ses droits civils et politiques et n’avoir jamais été condamné à une peine afflictive et infamante ; • Etre propriétaire en Haïti ou y exercer une profession ; • Résider dans le pays depuis cinq (5) années consécutives ; • Avoir reçu décharge de sa gestion si on a été comptable des deniers publics.
L’analyse des pièces soumises par le Premier Ministre désigné, au regard des cinq premiers critères définis à l’article 157, et étant entendu que celui-ci n’a pas été comptable de deniers publics, a révélé ce qui suit :
1. De la qualité d’Haïtien d’origine / de la non renonciation à sa nationalité Monsieur Daniel Gérard ROUZIER, né à Port au Prince le 15 septembre 1960, des œuvres légitimes de monsieur Pierre Emile Gérard ROUZIER et de Joseph Alice Marie Hélène BRUN, est haïtien d’origine puisque né de père et de mère haïtien qui eux-mêmes, descendants respectifs de monsieur Pierre Raoul ROUZIER et de Georgette Odéïde, d’une part, de Daniel BRUN et de Madeleine BORNO, d’autre part, sont nés haïtiens conformément à l’article 11 de la Constitution haïtienne. La Commission Spéciale, à propos de l’impératif de la « non-renonciation à la nationalité haïtienne » tant par Monsieur ROUZIER, que par ses père et mère, ne dispose pas d’éléments suffisants pour vérifier si ces derniers au moment de la naissance de monsieur Daniel Gérard ROUZIER, n’avaient pas renoncé à la nationalité haïtienne. Il en est de même pour Daniel Gérard ROUZIER qui, suivant les documents d’état civil fournis, est né haïtien. En fait, rien dans le dossier ne permet d’établir que le Premier Ministre désigné, ainsi que ses père et mère aient, à un moment de leur vie, renoncé à la nationalité haïtienne.
2. De l’âge requis pour être Premier Ministre Pour avoir pris naissance le 15 Septembre 1960 et pour être âgé de cinquante (50) ans et neuf (9) mois, Monsieur Daniel Gérard ROUZIER répond au critère de l’âge requis par l’article 157.2 de la Constitution en vue d’occuper la fonction de Premier Ministre du Gouvernement.
3. De l’exercice des droits civils et politiques La radiographie du dossier de monsieur Daniel Gérard ROUZIER a également révélé que ce dernier jouissait pleinement de ses droits civils et politiques puisqu’il dispose, d’une part, d’un certificat de casier judiciaire daté du 23 mai 2011, délivré par le Greffe du Tribunal de Première Instance de Port au Prince, attestant qu’il n’a jamais été l’objet de condamnation correctionnelle ou criminelle et, d’autre part, d’un certificat daté du 7 juin 2011, délivré par le Bureau de Renseignements Judiciaires (BRJ) de la Direction Centrale de la Police Judiciaire précisant que le premier Ministre désigné n’est pas recherché par la Police nationale d’Haïti. Figurent à son dossier, sa carte d’identification nationale (CIN), émise le 7 septembre 2005, portant les numéros : 01-01-99-1960-09-00191 et sa carte d’identité fiscale, expirée le 24 Mars 2007, portant le numéro : 003-023-637-8. Le dossier de monsieur Daniel Gérard ROUZIER semble donc conforme aux prescrits de l’article 157.3 de la Constitution.
4. De l’exercice du droit de propriété ou d’une profession Le Premier Ministre désigné jouit du statut de propriétaire à raison d’un titre de propriété, passé au rapport du Notaire GARRY BRISSON CASSAGNOL en date du 30 Mars 2006 attestant l’acquisition, faite par lui, des sieurs et dame Jacques D. BRUN, Louis Daniel BRUN et Marie Hélène BRUN, d’un terrain d’une superficie de 1547 mètres carrés, sis à Pétion Ville, dépendant de l’habitation Berthé. En outre, le Premier Ministre désigné a exercé les fonctions de Président Directeur Général de la Société anonyme E-power et celle de Président du Conseil d’Administration de la Sun-Auto S.A. Ceci atteste la conformité de son dossier au prescrit de l’article 157.4 de la Constitution.
5. L’obligation de résider dans le pays depuis cinq années consécutives
En réponse à l’exigence de résidence dans le pays depuis cinq années consécutives, le dossier du Premier Ministre désigné comprend un acte de notoriété délivré par le Juge de Paix de Pétion-Ville, ainsi qu’un certificat de résidence daté du 9 Juin 2011 émis par la Présidente du Conseil Municipal de Pétion ville, Madame Claire Lydie PARENT, attestant que monsieur Daniel Gérard ROUZIER demeure dans la Commune de Pétion-Ville, au numéro 105 de la rue Daniel Brun, Pétion-Ville, Haïti.
Si ces documents peuvent manquer de force probante, le Premier Ministre désigné a également soumis à l’appréciation de la Commission Parlementaire Spéciale, deux passeports délivrés par l’Etat haïtien, portant les numéros PP1815940 et PP2467869. On y remarque des visas chinois, Schengen et des Territoire d’Outre-mer français. L’absence de visas américains et le constat de sceaux d’entrée et de sortie de l’Immigration américaine, semblent indiquer que le Premier désigné serait un résident américain, ce qui pourrait constituer un accroc à l’article 157.5 de la Constitution haïtienne.
Toutefois, le premier Ministre désigné peut bien posséder la qualité de « résident américain » et résider en fait, c’est-à-dire effectivement, en Haïti. Une analyse minutieuse de ses sorties et rentrées, à partir de son passeport, confirme sa situation de résident de fait dans le pays pendant cinq années consécutives, sous réserve de données contraires que pourrait fournir la Direction de l’Immigration et de l’émigration du Ministère de l’Intérieur et des Collectivités Territoriales.
IV. RESERVES
L’examen des exigences posées par l’article 157 de la Constitution concernant la désignation du Premier Ministre, révèle que le dossier du Premier Ministre désigné est recevable.
Toutefois, la Commission parlementaire spéciale émet des réserves ; les déclarations sur le fait que Mr Rouzier devrait être ratifié sans aucun doute par les deux Chambres reposent sur le sentiment que l’analyse des pièces fournies serait la seule mission des membres de la commission. Bien qu’a un niveau également certaines explications devraient être fournies : (par exemple pourquoi le montant des impôts payer par Mr Rouzier est si bas au vu de ses revenues supposes dans le pays, absence de CFPB pour les années 2007, 2008, 2009, comme il dit qu’il était propriétaire d’une maison détruite en 2010 par le séisme du 12 janvier, absence de la traduction de la lettre de nomination comme consulte honoraire de la Jamaïque, absence de contrat de vente d’énergie de E-Power a l’état Haïtien, absence de preuve de revenue annuelle ?), il est donc clair que le processus de ratification va au-delà d’une simple vérification de pièces. En lisant le Curriculum Vitae de monsieur Daniel Gérard Rouzier, Premier Ministre désigné par son Excellence le Président de la République, Monsieur Joseph Michel Martelly, plusieurs éléments ont conduit les membres de la commission à évoquer la possibilité d’insurmontables conflits d’intérêt aussi bien au niveau politique, social qu’économique.
Conflit d’intérêts au niveau politique
Il apparait que Monsieur Daniel Gérard Rouzier, en référence de la lettre du Premier Ministre et ministre des affaires étranger et d’échange l’Honorable Dr Kenneth O. Baugh de la Jamaïque en date du 14 May 2010 Réf. 202/801/65 a stipuler que ‘‘ We look forward to working with you in the years ahead, and we are confident that during your tenure, you will defend and promote to the best of your ability, the interests of Jamaica in Haiti ”. Quelles sont les relations entretenues avec la Jamaïque ou les Jamaïcains qui justifieraient ce choix. En référence à l’article 13.2 de la Constitution. Il est acquis que les pièces soumises, notamment l’acte de naissance, les différents livrets de passeport, les cartes d’immatriculation fiscale et d’identification nationale attestent de la nationalité d’origine du sieur Gérard Daniel Rouzier. Elles ne permettent pas, en revanche, d’établir s’il n’a jamais été en situation de perte de sa nationalité.
Conflits d’intérêts au niveau social
Monsieur Daniel Gérard Rouzier représenté l’archétype de la bourgeoisie élitiste. Au-delà de son engagement pour les plus pauvres (Food for the poor) pense-t-il pouvoir représenter cette classe moyenne qui a été la pricipale victime des desastres qui ont frappe Haiti depuis plus de 3 ans et certainement la meilleure opportunite de relance de notre économique. Certains voient la classe sociale qu’il représente comme étant le principal obstacle au développement d’une classe moyenne forte car elle contrôle tous les leviers économiques et financiers. D’ailleurs, durant les vingt dernières années, cette classe sociale a été intimement associée aux différents reversements de l’ordre démocratique. Comment se situe Monsieur Daniel Gérard Rouzier face a ce positionnement idéologique « le pouvoir aux plus capables » ? Conflits d’intérêts au niveau économique
Monsieur Daniel Gérard Rouzier est l’un des principaux actionnaires d’une compagnie qui annonce vouloir investir plus de 59.3 millions de dollars américain en Haïti. Il se trouve que pour l’instant, l’état haïtien est le seul et unique client de cette compagnie d’énergie électrique. Monsieur Daniel Gérard Rouzier annonce qu’il aurait démissionne du conseil d’Administration de E-Power. Nous prenons acte de la lettre, mais peut-il nous prouves qu’il a vendu la totalité de ses actions (à qui dans l’éventualité positive) ? Enfin, il serait important que nous connaissions les noms des autres actionnaires de cette compagnie afin de nous assurer qu’il n’y aura pas de conflits d’intérêts dans les marches publique. Par ailleurs, il est bruit que de nombreux entrepreneurs ont intégré l’équipe économique de Mr Rouzier, quelle garantie que le e le Premier Ministre désigné peut nous donner afin d’éviter qu’il n’y aura pas de favoritisme ou d’échanges d’informations confidentielles pour les futurs appels d’offres ?
Sous ce rapport, des zones d’ombre subsistent, quant à la fonction de consul honoraire de la Jamaïque auprès de l’Etat haïtien exercée par M. Pierre Gérard Daniel Rouzier, poste pour lequel il a remis sa démission au Vice-ministre des affaires étrangères jamaïcain. En effet, les dispositions de la Convention de Vienne spécifiques au rôle du Consul honoraire, notamment les articles 1er al. 3, 67, 68 et 71, font état tant d’immunité de juridiction que d’inviolabilité personnelle en relation avec cette position officielle. L’exercice de la fonction consulaire honoraire demeure ainsi sujet à interprétations diverses quant à son caractère administratif ou politique.
Face au doute qui peut donc être entretenu sur la nature du poste occupé par M. Rouzier, la Commission estime qu’il y aurait lieu d’apprécier si dans l’exercice effectif de ses fonctions, le Premier Ministre désigné a posé des actes ayant une portée politique, pour le compte du Gouvernement Jamaïcain, et de nature à porter atteinte aux intérêts supérieurs de la nation haïtienne Il reste que la sanction de déchéance de nationalité relevant, selon le décret du 6 novembre 1984 sur la nationalité, de la compétence du Président de la République qui l’exerce par arrêté, la Commission n’a pas qualité pour se prononcer, par voie d’autorité, en la matière.
V. RECOMMANDATIONS
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NDCDP-Politique.
Comme on le verra dans le document posté sur scribd.com, il n'y a pas de recommandations dans le rapport de la commission parlementaire. La rubrique Recommandations contient un ensemble de 19 traits continus (des "blanks"). Il semble donc que la commission n'ait fait aucune recommandation à l'Assemblée des députés comme cela a été largement rapporté dans la presse.
Cependant, le document posté par haiti-info.com (1) contient des recommandations défavorables à Daniel Rouzier et qui s'adressent également, bizarrement, directement au Président Martelly:
«La nomination d’un Premier Ministre va donc bien au-delà d’une simple analyse de pièces et de l’expose de sa politique générale. Il nous semble que les conflits d’intérêts qui existe a différents niveaux ne nous permettent pas de recommander a l’assemblée de ratifier le choix de Mr Daniel Gérard Rouzier pour le poste de chef de gouvernement, a moins de considérer que l’élection du Président Joseph Michel Martelly l’exonéré de l’obligation de choisir un Premier Ministre qui soit libre de redevances envers des particuliers, des institutions, des entreprises ou de pays étrangers. Nous demandons donc au Président Joseph Michel Martelly de soumettre le plus rapidement possible aux Présidents des deux Chambres le nom d’une autre personne qui puisse, sans conflits d’intérêts majeurs, occuper cette fonction. Comprenant l’urgence de la mise en place d’un nouveau gouvernement.»
D'autre part, la version lue à la séance du 20 juin se termine par des recommandations correspondant à celles rapportées par Alterpresse (2):
«Tenant compte des réserves formulées par la commission parlementaire spéciale en ce qui concerne des zones d’ombre que recèle le dit dossier, les neuf commissaires, soussignés, députés du peuple de la 49e législature, recommandent à l’Assemblée des députés de statuer souverainement sur la ratification du choix fait par le président de la République».
Il existerait donc au moins trois versions du rapport de la commission spéciale. En ce qui a trait aux recommandations, laquelle des trois versions a été signée par les membres de la commission et remise à l'assemblée des députés ? Celle qui a été lue à la Chambre et diffusée en directe dans les médias et rapportée par Alterpresse serait la bonne version du rapport de la commission spéciale.
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(1) haiti-info.com.
(2) alterpresse.org.
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