dimanche 22 juillet 2012

Syrie : «Avec ou sans Assad, ce régime va tenir», Alexandre Orlov, ambassadeur de Russie en France


Ambassadeur de Russie à Paris, Alexandre Orlov
Photo: leparisien.fr, 22 juillet 2012



Source: leparisien.fr, 22 juillet 2012
Propos recueillis par Bruno FANUCCHI


En poste à depuis octobre 2008, l’ambassadeur Alexandre Orlov nous explique la position de la Russie — souvent incomprise — sur la syrienne et laisse ouvertement entendre que le Bachar al-Assad est désormais prêt à négocier son départ.

Est-ce le début de la fin pour Bachar al-Assad?
ALEXANDRE ORLOV.
Le président syrien a toujours, d’après nos informations, un soutien assez fort de son peuple. Nous avons des contacts avec différentes franges de l’opposition syrienne : il y a des opposants de l’extérieur, comme ceux du Conseil national syrien (CNS), et d’autres groupements qui sont basés en France, en Turquie ou ailleurs. Mais il y a aussi une opposition intérieure qui, elle, est prête à négocier avec le président actuel. C’est pourquoi nous avons toujours souligné que c’est le peuple syrien qui doit décider de son avenir et élire son président. Le fait que le communiqué final de Genève du 30 juin ait été accepté par le président Bachar al-Assad, qui a déjà désigné son représentant pour les futures négociations avec les opposants, montre qu’en son for intérieur le président accepte l’idée qu’il pourrait partir. C’est déjà une évolution très importante.


François Hollande affirme que la chute de Bachar al-Assad est « inéluctable »… Moscou serait prêt à lui accorder l’asile politique? C’est une question qui reste hypothétique. C’est vrai qu’il est difficile d’imaginer qu’il va rester. Il va partir et je crois qu’il le comprend lui-même, mais il faudrait organiser cela d’une façon civilisée, comme on l’a fait au Yémen par exemple. Contrairement à la Libye où Kadhafi était un homme seul, en Syrie, il y a un régime baasiste qui existe depuis des décennies. Avec ou sans Assad, ce régime va rester et tenir.

Pourquoi la Russie a-t-elle opposé à nouveau son droit de veto jeudi au Conseil de sécurité de l’ONU?
Avec ce projet de nouvelle résolution, les pays occidentaux ont bafoué les accords de Genève du 30 juin, prévoyant une transition du pouvoir du président actuel vers un organe de gouvernement provisoire représentatif de toutes les forces politiques. La Russie y a donc opposé son veto pour deux raisons :

1. Ce projet était unilatéral, car toutes ces dispositions visaient uniquement le président Assad, alors qu’il y a deux parties en conflit, qui toutes les deux emploient des armes.

2. La référence au chapitre VII la Charte des Nations unies ouvrait la voie à une intervention militaire comme en Libye, avec les conséquences que l’on connaît. L’an passé en Libye, nous avons eu le sentiment d’être roulés : cette résolution ne prévoyait pas du tout l’intervention militaire, mais elle a été interprétée par les Occidentaux comme donnant le feu vert à cette intervention. On ne fera pas deux fois la même erreur!

La France vous semble-t-elle partie prenante dans ce conflit?
Je ne veux pas le croire. Même si l’ambassadeur de France à l’ONU, Gérard Araud, a dit que la France allait « continuer à accompagner l’opposition syrienne dans sa lutte contre le régime Assad » et que la représentante des Etats-Unis, Mme Susan Rice, a déploré que la Russie ne veuille pas collaborer avec les Etats-Unis « pour changer le régime à Damas ». Cela dévoile bien les intentions des Occidentaux, mais est-ce vraiment le rôle de l’ONU, même s’agissant d’un régime peu sympathique? S’ingérer dans les affaires intérieures d’un pays pour changer son dirigeant, cela remet en cause tout l’ordre international conçu et entériné par la Charte des Nations unies après la Seconde Guerre mondiale. Cela ouvre la boîte de Pandore : on a changé hier le dirigeant de la Yougoslavie, de l’Irak, de la Libye, aujourd’hui de la Syrie, demain de l’Iran, après-demain de la Corée du Nord… et ainsi de suite.

Mais la crise syrienne n’est-elle pas devenue une crise internationale?
Bien sûr, c’est une crise internationale… mais surtout la crise de confiance entre les membres du Conseil de sécurité. C’est pour cela qu’il faut travailler avec les deux parties. Ce que l’Occident n’a pas fait jusqu’à présent, préférant inciter l’opposition armée à aller jusqu’à la victoire finale. Mais ce sera un bain de sang pour le peuple syrien et nous voulons l’éviter. Le plan de Kofi Annan reste d’actualité. C’est la seule façon de régler ce conflit qui soit acceptable pour tout le monde.

La mission des observateurs de l’ONU est-elle encore utile en pleine guerre civile?
La présence d’observateurs internationaux est très utile, plus que jamais. Car c’est une des rares sources fiables d’information sur ce qui se passe en Syrie, où il y a beaucoup de désinformation, et cela calme un peu les deux belligérants.

Alors quelle est votre analyse des événements en Syrie?
Ce qui se passe en Syrie, c’est une confrontation entre deux tendances de l’islam : les sunnites, représentés par l’Arabie saoudite et le Qatar, qui arment l’opposition, et les chiites, représentés par la Syrie et l’Iran. Ce n’est pas notre guerre, mais nous voyons chez les sunnites les tendances les plus radicales de l’islam, les salafistes et les wahhabites, que nous avons combattus en Tchétchénie. Cela nous inquiète, car nous avons dans la Fédération de Russie beaucoup de musulmans.

La Russie paraît être le dernier soutien d’Assad…
C’est une contre-vérité de dire que la Russie défend le régime d’Assad. Il n’y a aucun lien particulier qui lie la Russie au président Assad et à son clan, alors qu’il a toujours été un grand ami de la France. Il a été reçu royalement à Paris et a été invité au défilé du 14 Juillet en 2008. Mais il est vrai que la Russie a des intérêts en Syrie qui est notre partenaire de très longue date. Du temps de l’Union soviétique, beaucoup de Syriens ont fait leurs études supérieures chez nous. Il y a beaucoup de mariages mixtes et la communauté russe compte plusieurs dizaines de milliers de personnes en Syrie. Sur le plan économique et militaire, notre intérêt est en revanche très exagéré.

Comment cela se passe entre Vladimir Poutine et François Hollande?
Le premier contact, le 1er juin, entre deux présidents fraîchement élus a été positif. Ils ont exprimé le désir d’intensifier les relations entre nos deux pays, surtout dans le domaine économique. Le courant est bien passé puisque le président Poutine a téléphoné à son homologue français dans les jours suivants. Le choix de Paris et Berlin le même jour pour sa première visite à l’étranger est significatif. Dès sa prise de fonctions, le 7 mai, le président Poutine a signé un décret fixant les priorités de sa politique étrangère et, parmi celles-ci, la définition d’un espace commun économique et humain entre la Russie et l’Europe. Cela va dans le sens de la fameuse phrase du général de Gaulle parlant de « l’Europe de l’Atlantique à l’Oural ». Le temps est venu de commencer à bâtir cette grande Europe.

dimanche 15 juillet 2012

Les dernières cartouches de l'ambassadeur Merten

 
Source: lenouvelliste.com, 13 juillet 2012
 
Propos recueillis par Frantz Duval
 
7 heures du matin, le rendez-vous est pris pour une interview. La dernière avec Kenneth H. Merten. L'ambassadeur américain reçoit Le Nouvelliste sur la galerie de sa résidence à Bourdon. En 20 minutes le point est fait sur sa mission qui s'achève. Calme et honnête, comme pendant toute la durée de son séjour en tant qu'ambassadeur, Merten répond aux questions sans langue de bois, mais en diplomate parfait.
 
 
Le Nouvelliste (L.N.) : La tournée des médias pour faire ses adieux, ce n’est pas la norme; pourquoi la faites-vous ?
Kenneth H. Merten (K.H.M.): Je viens de passer trois années assez mouvementées en Haïti. Il y a eu aussi pendant cette période des réalisations importantes, il est simplement venu le temps de faire le bilan avant de quitter le pays.

L.N. : D’habitude, les adieux des ambassadeurs américains se font à l’occasion d’un grand discours; vous, vous passez de média en média, vous avez un message à transmettre, Monsieur l’Ambassadeur ?
K.H.M. : J’ai deux messages que j’aimerais transmettre au peuple haïtien : d’abord merci. A chacune de mes trois affectations en poste en Haïti je me suis toujours senti le bienvenu, toujours senti chez moi, à l’aise, confortable. Je veux dire merci pour tout cela. J’aimerais aussi souligner pour mes amis Haïtiens que je suis optimiste pour l’avenir de ce pays, mais il faut continuer à travailler, à se battre chaque jour pour que le pays avance. Je suis certain que le pays va avancer, mais il faut, et j’insiste, des investissements. Il faut travailler dur, et surtout, il ne faut pas compter sur l’aide, l’aide américaine, l’aide de la communauté internationale, l’aide des institutions internationales, l’aide des ONG. Toute cette aide ne va pas, ne peut pas transformer le pays.
C’est seulement l’investissement et seulement le dur labeur des Haïtiens qui pourront faire la différence.
Je ne transmets pas un message pessimiste, au contraire, je suis optimiste. Mais je crois qu’il revient aux Haïtiens de créer un pays comme ils le rêvent. Leur avenir est entre leurs mains. Le moment est propice, les étrangers veulent venir ici investir, les Haïtiens d’ici et de la diaspora le veulent aussi, c’est la seule façon de transformer ce pays.

L.N : Monsieur l’Ambassadeur, vos conseils sont à prendre avec attention, vous avez une position d’observateur avisé : vous trouvez que les Haïtiens ne travaillent pas assez dur… ?
K.H.M. : Pas du tout, au contraire, les Haïtiens travaillent très dur. Mais il est facile à constater qu’il y a beaucoup de chômage, les gens n’ont pas assez d’opportunités de travail, les Haïtiens sont parmi les peuples les plus travailleurs au monde. Mais pendant les 25 dernières années, surtout après l’embargo, ils n’ont pas eu beaucoup d’opportunités de trouver du travail.

L.N : Vous parlez des limitations de l’aide, vous êtes l’ambassadeur américain sous le mandat duquel Haïti a reçu le plus d’aide des Etats-Unis d’Amérique en même temps, c’est vous qui avez le discours pour nous dire que l’aide ne suffira pas pour nous sortir de nos problèmes. On a échoué quelque part avec l’aide, on en a mal compris le mécanisme ?
K.H.M. : Non. Je ne crois pas que le qualificatif est "échoué" . Il faut bien comprendre ce qu’un pays peut réaliser avec l’aide externe. Ce n’est pas seulement en Haïti, c’est le cas dans tous les pays.
Permettez que j’utilise une image : quand on bâtit une maison, il faut d’abord ériger les fondations. Des fondations solides. Et, ensuite, construire la maison. L’aide peut aider un pays à mettre en place les fondations, mais c’est au peuple de ce pays de construire sa maison à partir de ses rêves et de sa vision.
L’aide ne peut pas parvenir à transformer ou à construire un pays.
Je ne parle pas uniquement d’Haïti. Si on regarde les pays qui sont passés ces dernières décennies du stade de pays assez pauvres à celui de pays assez riches : la Chine, Taïwan, la Corée du Sud, l’Afrique du Sud, ce sont des pays qui ont décollé grâce aux investissements privés.
L’aide peut aider, l’aide peut encourager, l’aide ne peut pas transformer un pays.
D’ailleurs, il n’y aura jamais assez d’aide pour changer un pays. Les pays donateurs, même les Etats-Unis, ont tous des problèmes budgétaires. L’aide est susceptible d’être coupée à n’importe quel moment et plonger les pays receveurs dans la difficulté.

L.N : Certains vous placent dans la catégorie des ambassadeurs très honnêtes. Vous partez et faites le point sur l’aide à un moment où, en dépit des montants décaissés récemment qui sont les plus importants de l’histoire de la coopération entre Haïti et les USA, il n’y a pas de gros projets visibles qui ont pu être réalisés. Le parc industriel de Caracol, lequel est le porte-étendard de l’action américaine en Haïti, est inachevé et essuie des critiques: le parc ne va pas tenir ses promesses en termes de création d’emplois pour 2012; vous mettez tout cela dans la balance ?
K.H.M. : Je ne suis certainement pas d’accord avec les critiques sur Caracol. Il y a toujours des gens qui critiquent parce que c’est plus facile de le faire que de passer à la réalisation soi-même. Je les comprends, il en est toujours ainsi partout, et je l’accepte.
Le projet du parc industriel de Caracol est une des réalisations (les Etats-Unis y contribuent avec le gouvernement haïtien, la Banque interaméricaine de développement et des entreprises privées) qui ont la possibilité de transformer Haïti en un pays prêt à accueillir les investissements à l’aube du XXIe siècle.

L.N : Il y a cependant des aspects à corriger. Les critiques servent à cela…
K.H.M. : Il y a toujours des choses à améliorer dans tout projet; quelle que soit l’initiative on est confronté à des imprévus et on doit faire un changement par-ci, un retouche par-là, je suis cependant très confiant que si le projet du parc industriel de Caracol est bien géré, il sera une réussite.

L.N : Lors du dîner donné en votre honneur par la Hamcham, l’une des questions soulevées touchaient aux contrats octroyés grâce à l’aide américaine et attribués presque exclusivement à des entreprises américaines. Les entreprises haïtiennes sont mises sur la touche, vous avez été d’une honnêteté remarquable pour ne pas le nier et annoncer que des correctifs sont en cours d’implémentation. Nous sommes en route pour que cela soit corrigé ?
K.H.M. : Oui. Je le crois et je l’espère. Nous avons, comme je l’ai dit lors de la soirée, un nouveau projet USAID Forward qui introduit de nouvelles manières de travailler dans nos pays partenaires. On va faire plus d’effort pour chercher et trouver des partenaires locaux pour nos projets. Soit des membres du secteur privé, soit des ONG du pays où nous sommes visiteurs.
Cela vient d’être lancé il y a à peine quelques mois, nous sommes en train d’identifier des partenaires haïtiens. Nous avons organisé une journée portes ouvertes pour les entreprises et les ONG haïtiennes pour leur expliquer comment ils peuvent répondre aux appels d’offres de l’USAID.
Naturellement, ces nouveaux partenaires doivent passer les étapes de validation car le Congrès américain tient à ce que tout se passe en toute transparence. Nous devons veiller à savoir où l’argent va et à qui, et aussi nous assurer aussi que ces firmes ou ONG répondent aux standards que nous établissons pour les firmes et ONG américaines. La compétition sera ouverte à tous et sera équitable.
L’évaluation des résultats est aussi très importante.

L.N : J’ai eu la chance de visiter au Département d’Etat le desk qui s’occupe d’Haïti, seuls deux pays ont un desk aussi important : Haïti et l’Afghanistan, m’a-t-on expliqué. Un staff si important cela ne complique-t-il pas la communication entre Haïti, les ambassades des deux pays, le Département d’Etat, le ministère des Affaires étrangères d’Haïti ? Cela fait beaucoup de monde, cela favorise-t-il de meilleures relations entre les deux pays?
K.H.M. : Cela ne favorise pas, cela ne complique pas. C’est une réalité.
Vous savez, pour cette administration du président Barack Obama, Haïti est une priorité. Après le séisme, les besoins étaient tels que le Congrès a mis beaucoup d’argent à la disposition d’Haïti, soit pour des dépenses humanitaires, soit pour des programmes de relèvement, il fallait du monde pour gérer toute cette assistance.

L.N : Haïti a-t-elle assez de vis-à-vis pour comprendre la politique américaine en Haïti ?
K.H.M. : Oui, je le crois d’autant que vous avez maintenant un ambassadeur à Washington…

L.N : Enfin…
K.H.M. : … qui connaît bien Washington. C’est un homme sérieux et bien formé. Et il est bien connecté dans l’administration Martelly-Lamothe. Je crois que cela va beaucoup aider pour la communication.
De notre côté, ici à l’ambassade, nous avons toujours de bonnes relations avec les ministères, le Premier ministre et le président. Nous n’avons pas à nous plaindre de la qualité de la communication.

L.N : Faisons le bilan politique de votre mission. Il y a ce fameux communiqué qui a changé le cours des élections en décembre 2010, il y a aussi le déjeuner en votre résidence entre la secrétaire d’Etat et les principaux candidats engagés dans la course électorale où certains disent que c’est décidé le choix du gagnant de l'élection présidentielle de 2011, on met aussi dans votre bilan le président René Préval lâché par les Etats-Unis à un certain moment. Vous acceptez ce bilan politique de votre mission ?
K.H.M. : Je ne l’accepte pas. (Petit rire).
Comme je l’ai expliqué à plusieurs reprises, le gouvernement haïtien nous a invités à participer à la réalisation des élections législatives et présidentielle en 2010, d’autres partenaires de la communauté internationales et nous. Les USA y ont contribué à hauteur de seize millions de dollars. Le contribuable américain insiste pour que son argent aille à des élections qui vont refléter la volonté et la décision du peuple haïtien. C’est tout ce qu’on a voulu faire, on a voulu appuyer le processus, jamais appuyer un candidat, nous n’avions aucune préférence pour M. Martelly, M. Célestin. Mme Bijoux, X ou Y. Pour nous, ce n’était pas important du tout.
Nous avons rencontré presque tous les candidats avant les élections et nous n’avons pas choisi de favori, c’est le processus que les Etats-Unis ont toujours soutenu. C’était clair pour nous.
Il était clair aussi pour nous, pour l’OEA, pour les observateurs et pour de nombreux Haïtiens que les résultats du premier tour publiés en décembre 2010 ne reflétaient pas la réalité qu’on avait observée sur le terrain. C’est tout. Point final.
La visite de Mme Clinton visait à expliquer, à son niveau, ce que nous avons observé, et rappeler que nous avons travaillé ensemble avec nos partenaires haïtiens et internationaux pour assurer des élections qui reflètent la volonté du peuple haïtien. C’est tout.
Nous n’avons pas laissé tomber le président René Préval. Nous avons toujours bien travaillé avec lui. Même après les élections, nous avons pu ensemble avec lui, avec le Premier ministre Bellerive, réaliser des projets.
J’ai toujours, et aujourd’hui encore, de très bonnes relations avec le président Préval. Je l’ai vu récemment.

L.N : Il y a de nouvelles élections qui arrivent sou peu. Il y a un Conseil électoral permanent à mettre sur pied, vous êtes optimiste, vous qui avez vécu tant d’élections en Haïti ?
K.H.M. : Je suis optimiste.
Ce qui est important, surtout pour les investisseurs, c’est la stabilité. Le CSPJ qui est installé, la publication des amendements de la Constitution, la Cour de cassation qui est complétée et les élections qui vont se tenir, tout cela sont de bons signaux.
Nous allons apporter notre appui aux prochaines élections de concert avec nos partenaires de la communauté internationale pour assurer qu'elles soient transparentes et reflètent la volonté du peuple haïtien.

L.N : C’est votre troisième mission en Haïti, on ne sait pas s’il y aura une quatrième, quel est votre bilan personnel de vos passages en Haïti ?
K.H.M. : Comme je l’ai déjà dit, cela me fait trois affectations en Haïti. J’ai vécu sur place trois coups d’Etat, deux cyclones, un tremblement de terre, une grande mission humanitaire et quatre élections. J’ai l’impression que j’ai accompagné le peuple haïtien à divers moments de sa vie, j’espère, et je crois, que maintenant le pays est dans la situation, enfin, de pouvoir décoller. C’est en tout cas mon impression.
Les choses ont vraiment changé pour le meilleur. 2012 est une année clé. Ce semestre à venir est déterminant pour qu’Haïti montre aux investisseurs et à la communauté internationale que le pays a vraiment, comme on dit en anglais, turn the corner (passer le carrefour dangereux), que Haïti va attirer les investisseurs, va avoir la croissance économique, va prendre les décisions, difficiles parfois, pour son développement et pour sa stabilité. Je suis très confiant, c’est ma vision des choses. Je suis fier de ce que nous avons pu accomplir ici ensemble, l’ambassade et nos partenaires haïtiens. Je suis impatient de voir comment sera l’avenir.

L.N : Vos regrets ?
K.H.M. : Je n’ai pas beaucoup de regrets, un seul peut-être, je vais partir et le parc industriel de Caracol est encore inachevé. Je vais devoir suivre tout cela de loin, malheureusement.

Pour le retour de l'armée, Martelly donne et prend

Source: lenouvelliste.com, 11 juillet 2012

Par Frantz Duval
duval@lenouvelliste.com



Le président Martelly se montre fin stratège. Plus madré qu’on ne le pensait. Martelly le joueur, fidèle à sa réputation, mise à nouveau sur l’armée.

Après avoir donné l’impression de laisser tomber sa promesse de reconstituer les Forces Armées d’Haïti (FAD’H): de s’être débarrassé des faucons de son entourage comme des hommes de troupes qui montaient des casernes rebelles un peu partout sur le territoire; après avoir donné l’ordre de leur faire la chasse et de clore le dossier, le président le rouvre. D’une manière inattendue. De l’étranger étant.

D’abord une petite phrase dans une déclaration faite au Panama, puis au cours d'une visite officielle en Equateur accompagné de son ministre de la Défense et du directeur général de la Police nationale d’Haïti, tous deux anciens officiers des FAD’H. À son rythme, à son heure, le président dicte le calendrier.

Cette fois, pas question de passer par le Venezuela et le commandant Chavez. Trop nombreux étaient les amis d’Haïti qui s’inquiétaient de la passion de ce généreux voisin pour la résurrection de l’armée en Haïti. Pas question non plus de prendre la tangente pour une force de défense civile comme le lui proposait la France. Martelly revient plus finaud que prévu avec une solution équatorienne. L’équation change. La défense sera civile et militaire.

Avant d’avancer ses pions, le président de la République a mis au propre tous ses devoirs, respecté toutes les promesses accumulées depuis des mois. Il s’est débarrassé, puis a recasé plus loin de lui, ses proches mis à l’index par les organisations de défense des droits de l’homme ; il a publié la version amendée de la Constitution qui seyait aux amis d’Haïti ; il a complété la Cour de cassation, monté le CSPJ et ouvert la porte à la formation du Conseil électoral permanent. Le président a donné son plein appui au renforcement de la PNH.

Personne ne peut plus reprocher quoi que ce soit au président Martelly. A son tour, il peut se mettre au service de ses promesses de campagne électorale. Le retour de l’armée en fait partie. Le président lui-même a eu une très courte carrière de cadet à l’Académie militaire dans sa prime jeunesse.

Sa visite ce mercredi à l’Ecole supérieure militaire Eloy Alfaro lui a permis de renouer avec le faste et de s'approcher au plus près de ce que peut être l'armée nouvelle.

« Accompagné du ministre haïtien de la Défense, M. Rodolphe Joazile, et du directeur général de la Police nationale d’Haïti, M. Mario Andrésol, le chef de l’Etat haïtien s’est entretenu avec le ministre Carvajal, le directeur de l’Ecole militaire Eloy Alfaro, le général Gustavo Cabrera et le haut Etat-major, sur des questions liées à la structuration du ministère haïtien de la Défense, notamment à la formation de forces armées modernes pour Haïti, à l’accompagnement de l’Equateur dans la mise en place d’un Etat-major en Haïti, au renforcement de la police nationale et le rôle que devrait jouer la Minustah en Haïti », indique un communiqué de la présidence publié mercredi.

« Pour prévenir et réprimer d'éventuelles actions armées internes ou étrangères, étatiques ou non étatiques, susceptibles de porter atteinte à la sûreté de l'Etat, le gouvernement haïtien espère, à moyen terme, avec l'appui de la République d'Equateur :

a) créer un corps d'infanterie légère capable d'assurer la sécurité dans les zones frontalières et dans les régions reculées et difficiles d'accès;

b) renforcer les capacités techniques et opérationnelles des gardes-côtes haïtiennes;

c) former une unité d'aviateurs et de pilotes d'hélicoptères;

d) créer une unité militaire antiémeute et de déminage », annonce la présidence.

« Dans le cadre de la coopération entre Haïti et la République d'Equateur dans le domaine de la défense civile, le gouvernement haïtien souhaiterait :

a) créer un corps de génie au sein du ministère haïtien de la Défense capable d'intervenir à titre d'appui technique, logistique et opérationnel dans de grands travaux d'infrastructure ou communautaires;

b) former un corps de sauvetage en milieu maritime et terrestre capable d'intervenir au profit des membres de la population civile, en cas de catastrophes naturelles ou humaines;

c) instituer un corps d'intervention humanitaire capable d'organiser la gestion humanitaire et les services d'ordre, dans les régions affectées, lors des situations post-désastres. »

L’armée et la défense civile dans un même paquet, cela enrobe le retour de l’armée d’une aura plus moderne que la dernière tentative sauvage d’imposer par la rue le retour des militaires.

L’avenir dira rapidement si le président Martelly a donné assez de garantie pour pouvoir prendre ce trophée qu’est le retour de l’armée après la débandade de 1994-1995.

jeudi 5 juillet 2012

Didier Le Bret, pa m' se pa m'.

Par Dr. Pierre Montès

Kreyol palé, kreyol konpran n'.

J'emprunte le titre de la "toun" (chanson) du chanteur Marc-Yves Volcy (*) pour répondre à l'ambassadeur Didier Le Bret: «pa m' se pa m».

J'emprunte aussi les paroles de la chanson pour répondre à l'ambassadeur en la circonstance.

En voici un extrait:

«kouzen mwen se yon gason ki fen
koutwazi nan men n' se pa monnen
rann sèvis l' chanje sa an plezi
se pou sa l' menm anvi di ou mèsi

kouzen mwen p' ap di ou anyen k'pa sa
santiman l' konn sa sa vle di sa
pa bokit li pot bel kalite
sèl defo l' pedan dènye degre

pi misye yon ti jan lèd
mwen di ou li lèd
se kòmsi l' fè ekspre li pran pwen l' pran remèd
misye lèd li lèd li lèd

men pa di avè m'
pa m' se pa m
pa m' se pa m
pa m' se pa m.»



J'ai aimé les réflexions de Louis Calvet exprimées dans  sa lettre ouverte à Monsieur Frantz Duval, rédacteur en chef du journal Le Nouvelliste, publiée le 28 juin 2012.

Monsieur Calvet commence sa lettre ainsi:

«Concernant l'incident Jean-Claude Duvalier/ambassadeur de France, je vous fais parvenir ces réflexions parce que j'estime que, par-delà Duvalier, c'est le pays tout entier qui est victime de l'affront fait à un ancien chef d'Etat jusqu'à présent pas légalement déchu de ses droits civils et politiques. »

Cliquez sur le lien suivant pour la lire la suite:

lenouvelliste.com/ Louis Calvet/ Autour de l'incident impliquant l'ex-président à vie Jean-Claude Duvalier et l'ambassadeur de France en Haïti, Didier Le Bret.

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(*) Marc-Yves Volcy, Coffret de quatre CD sous le titre "À flots et à délire  Kat kabès", quatrième CD, plage 5.