Par Robenson Geffrard
Source: lenouvelliste.com, 4 avril 2012
Même s'il a toujours supporté publiquement le mouvement des « civils armés », l'homme fort du département de la Grand 'Anse nie toute implication dans l'armement de ces gens. Guy Philippe, qui revient en force sur la scène politique après plusieurs années dans le maquis, se dit prêt à aider à trouver une solution à ce problème.
Guy Philippe est de retour. Il est partout. Il n'est plus dans le maquis. Pour lui, la revendication des hommes et femmes armés qui occupent plusieurs bases à travers le pays est juste. L'armée a été injustement démobilisée par l'ancien président Jean-Bertrand Aristide. Selon le leader du Front pour la reconstruction nationale (FRN), le pays fait face actuellement à une crise d'institution avec cette question de remobilisation ou pas de l'armée. Guy Philippe se voit partie prenante dans une solution.
« Lors de la manifestation du 29 mars dernier des anciens militaires dans le Nord, je leur ai donné mon appui parce que je pense que leur revendication est juste et constitutionnelle. J'ai de très bons rapports avec les commandants de toutes les bases - Cap-Haïtien, Hinche, Limbé, Ouanaminthe. Ils réclament justice et réparation. Anarchiquement et illégalement, en janvier 1995, le président Jean-Bertrand Aristide avait démobilisé l'armée. Et, depuis lors, ces hommes sont dans la rue. Personne, aucune autorité morale du pays, n'a pris leur défense contre cette injustice », s'indigne l'ancien chef des insurgés dans une interview accordée au Nouvelliste, mercredi.
L'ancien chef des rebelles en 2004 contre le président Aristide se vante d'avoir pris ses responsabilités dans le dossier. « J'ai été leur porte-parole, j'essaie de parler à certains membres du gouvernement pour voir dans quelle mesure on peut trouver une solution à ce problème... », dit-il.
Cependant, Guy Philippe veut faire croire qu'il ignore tout de ces « anciens militaires ». Il ne sait pas de qui ils reçoivent leurs consignes. Mais il est sûr que cela ne vient pas de lui. « Je n'ai aucun mandat en ce sens. Je suis juste un citoyen responsable qui veut aider son pays. Je ne sais pas s'ils ont un état-major, je ne sais pas qui les commande, je ne sais pas comment ils fonctionnent, d'où proviennent leurs moyens, leurs armes, je ne sais pas... »
L'ancien commissaire de police ne sait qu'une chose de ces hommes armés: ils réclament justice, réparation et la remobilisation de l'armée.
A l'émission Panel Magik sur la Radio Magik 9 le 16 mars dernier, le sergent Yves Jeudy, l'une des têtes pensantes du mouvement basé au camp Lamentin, avait clairement dit que les armes qu'ils utilisent actuellement sont les mêmes qui ont servi en 2004 pour combattre l'ancien président Jean-Bertrand Aristide. A cette époque, Guy Philippe était le chef des insurgés.
« Nous avions déposé les armes depuis mars 2004 après avoir délivré Haïti de la dictature », rétorque Guy Philippe, soulignant qu'il y avait à cette époque plusieurs cérémonies de remise d'armes et que l'ancien Premier ministre Gérard Latortue les avait lui-même récupérées. Une façon pour lui de dire que les armes dont se servent les civils qui occupent des bases à travers le pays ne viennent pas de lui.
A la question de savoir comment gérer l'épineuse question des anciens ou futurs militaires, Guy Philippe conseille au chef de l'Etat de les rencontrer, les écouter et trouver une solution pacifique, à la lumière de la Constitution, ce qui sera bon pour le pays. « C'est un problème politique. C'est le président et les anciens militaires qui doivent trouver une solution rapide. Car plus les jours passent, plus la situation tend à dégénérer. Il y aura plus de bases, plus d'anciens militaires... »
Pour Philippe, le président Martelly, qu'il avait publiquement soutenu lors des élections, est toujours son ami. Mais « le président Martelly a son organisation politique, j'ai la mienne. Il n'y a aucun problème entre nous, je fais toujours confiance au chef de l'Etat. Je lui demande tout simplement de se remuer et de faire ce que la population attend de lui... »
L'ancien commissaire de police n'a pas voulu dire au Nouvelliste la dernière fois qu'il a rencontré ou parlé au téléphone avec son ami le président de la République. « C'est une information personnelle entre moi et le président », répond-il laconiquement à cette question précise.
Par ailleurs, Guy Philippe, qui a été pendant un certain temps dans le maquis, se félicite du fait que « la Direction centrale de la police judiciaire n'a aucun mandat contre lui. La DCPJ a dit à mon avocat qu'elle n'a rien à me reprocher. Alors je ne vois pas pourquoi je devrais me cacher », dit-il tout, accusant l'ancien président Préval d'avoir voulu le faire assassiner.
Il faut rappeler qu'après plusieurs opérations menées par la police nationale et la Drug Enforcement Agency (DEA) dans la commune de Pestel en 2009 pour tenter de capturer l'ancien chef de file de la lutte armée anti-Aristide, le ministre de la Justice de l'époque, Me Jean Joseph Exumé, avait confirmé le mercredi 3 juin qu'un mandat avait été émis contre le leader du Front pour la reconstruction nationale (FRN), Guy Philippe.
« Guy Philippe, le responsable du Front pour la reconstruction nationale (FRN), est officiellement recherché par les autorités haïtiennes », avait déclaré le ministre de la Justice, Jean Joseph Exumé. Cependant, le ministre n'avait voulu donner aucune information supplémentaire sur la nature et l'origine de ce mandat, c'est-à-dire si Guy Philippe était recherché par la justice haïtienne ou par la justice étrangère.
Robenson Geffrard
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