mardi 23 décembre 2014

Haïti-crise pré-électorale/ Cinq candidats au poste de Premier ministre pour l'année électorale 2015-2016

Par Dr. Pierre Montès
Mise à jour, 26 décembre 2014 (**)

À la suite de la démission du Premier ministre Laurent Salvador Lamothe, le Président Michel Joseph Martelly entreprend des consultations pour parvenir à la désignation d'un nouveau Premier ministre pour la période devant couvrir la cinquième et dernière année de son mandat (2015-2016).

En attendant, il nomme la Ministre de la Santé publique du gouvernement démissionnaire, Dr. Florence Duperval Guillaume, au poste de Premier ministre a.i. pour une période de 30 jours, conformément à l'article 165 de la Constitution de 1987 amendée.

En même temps, la Présidence de la République réduit à 5 noms, une liste initiale de 12 noms, de candidats qu'elle propose aux forces politiques de toutes tendances pour occuper le poste de Premier ministre.

Le Coin de Pierre-Politique classe ces 5 candidats en deux catégories et par ordre alphabétique.

A) Les candidats rompus à la chose politique:
  1. Duly Brutus
  2. Evans Paul
B) Les candidats perçus comme étant plus technocrates que d'être des politiciens chevronnés:

     4.  Jude-Hervé Day
     5.  Charles Jean-Jacques
     6.  Wilson Laleau

Les trois derniers candidats Day, Jean-Jacques et Laleau reçoivent peu d'appuis dans l'opinion publique (lignes ouvertes, média sociaux, etc., à ce jour).

Les deux premiers candidats reçoivent un plus large appui et Evans Paul semble se détacher dans le peloton de tête et laisser en arrière Duly Brutus.

a) Candidats à la Présidence aux élections présidentielles de 2015-2016 .-

S'il s'agissait de candidats à la présidence, Le Coin de Pierre-Politique percevrait Evans Paul comme le meilleur choix pour la Présidence (2016-2021). Dès  Janvier 2014, LCDP-Politique percevait le militant politique de la KID comme le candidat potentiel à la Présidence qui puisse à la fois obtenir des appuis solides au sein d'une grande majorité de la population, et bénéficier de l'appui des pays amis d'Haïti. Bon, Paul (dit K-Plim) s'est retiré (heureusement selon LCDP-Politique) du MOPOD, groupe de partis d'opposition radicale (dit «Zoblod» par le chef du parti OPL, le Dr. Sauveur Pierre-Étienne, une autre figure de proue de la gauche qui pourrait lui aussi créer des surprises en 2015-2016, s'il ne s'agissait pas du cas d'Haïti (un «singulier petit pays»).

Evans Paul renoncerait-il à la candidature à la Présidence aux élections présidentielles de 2015-2016 pour accepter, si les parties en présence se mettent d'accord, le poste de Premier ministre pour la dernière année du régime Martelly ?

Duly Brutus a un parcours politique très intéressant, s'il ne s'agissait pas d'Haïti.
Politique et diplomatie confondues, Duly Brutus est sur la scène depuis plus de deux décennies.

Il est issu du parti socialiste PANPRA de Serges Gilles, ce qui peut-être considéré en soi comme un «premier diplôme» en matière de bonne politique active. Cependant, cette qualité pourrait lui nuire dans un pays comme Haïti où les paradoxes en politique sont nombreux (e.g., Anténor Firmin vs. Nord Alexis en 1902; Leslie Manigat vs. René Préval en 2005-2006; Mirlande Manigat vs. Michel Joseph Martelly en 2010-2011). Actuellement, le PANPRA fait partie de la Fusion des sociaux démocrates dirigée par l'ex-sénatrice Edmonde Supplice-Beauzile.

Duly Brutus a eu une expérience du Pouvoir législatif: il fut député du Limbé. Puis, il a eu amplement le temps de limer sa cervelle dans la diplomatie à Washington (représentant d'Haïti à l'OEA). Cette expérience à Washington peut être considérée comme un «deuxième diplôme» en matière de diplomatie dans l'antichambre du plus puissant pays du monde. Mais une telle expérience pourrait peut-être lui nuire aux yeux du peuple, à l'heure actuelle.

Une autre épine au pied de Duly Brutus est qu'il fut Ministre des affaires étrangères du gouvernement démissionnaire de Laurent Lamothe. Mais il maîtrise bien ses dossiers. (On suggère d'écouter son entrevue le mois dernier avec Valéry Numa,en tant qu'invité du jour de Vision 2000). Il a la sympathie de l'ex-Premier ministre Gérard Latortue (On suggère d'écouter une entrevue de Latortue sur Vision 2000 il y a peu; il était l'invité du jour de Valéry Numa).

Dans tout autre pays, la feuille de route de Duly Brutus lui ouvrirait  la voie vers la Primature,... ou la Présidence.

Vu sous les deux angles diplomatique et politique, avec des lunettes haïtiennes, Duly Brutus aurait peu de chance aux élections présidentielles. Et s'il devait se porter candidat à la présidence, il faudrait qu'il se trouve un autre parti pour le faire, la FUSION ayant déjà son candidat: Edmonde Supplice-Beauzile.

Aurait-il alors le flair politique d'accepter le poste de Premier ministre pour le reste du mandat de Michel Martelly (2015-2016), si ce choix était entériné par les forces politiques en présence ?

a) Candidats à la Primature de 2015-2016 .-

Dans la conjoncture actuelle, les deux candidats au poste de Premier ministre ayant une expérience en politique haïtienne des 20 à 30 dernières années, sont Evans Paul et Duly Brutus. Ils sont mieux placés que les trois autres candidats, l'ingénieur Jude-Hervé Day, ancien ministre de la Planification, les ministres démissionnaires Wilson Laleau (Commerce et industrie), Charles Jean-Jacques (Affaires sociales). Ces trois derniers candidats ont, chacun de leur côté,  la technicité nécessaire pour occuper le poste de Premier ministre. Mais il leur manque la triture politique dont le pays a besoin à ce carrefour difficile.

En conclusion, si aucun compromis politique n'est trouvé dans les trente jours du mandat du PM. a.i, le Président Martelly sera placé dans l'obligation de prolonger la durée du mandat du PM, a.i., Dr. Florence Duperval Guillaume, qui sera chargé de l'organisation des élections que le Président Martelly devra déclencher en deux temps Législatives et locales dans la première moitié de 2015, suivies des élections présidentielles à la fin de 2015 et au début de 2016. avec le même CEP, ou bien des élections générales fin 2015- début 2016.
Le Président Martelly et son PM a.i, ont quelques semaines pour faire accepter ce choix (*).

Cette analyse sera mise à jour au fur et à mesure que la situation évoluera particulièrement vers la mi-janvier 2015.
Au moment d'écrire cette analyse, deux grandes inconnues dont le poids est considérable dans le système d'équations politiques (donc non-linéaires) de la politique haïtienne: une variable politique que contrôle l'opposition en manipulant la Rue;  une variable géopolitique contrôlée  par les pays amis d'Haïti qui donnent pleinement leur appui au Président Martelly jusqu'à ce jour.

Psychologiquement, l'année 2015, quand on la rapproche de l'année 1915, ne serait pas une bonne année pour organiser des élections en Haïti.

Faudrait-il alors attendre l'année 2016, après les cinq (5) ans du Pouvoir Martelly, pour organiser des élections générales et consacrer l'année 2015 à vider les querelles séculaires des fils de Pétion (qui se voient plutôt comme les fils de Charlotin Marcadieu (cf. Charlito Baker)) et des fils de Dessalines dans l'esprit du Rapport de la commission présidentielle consultative ?

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(*) Cela me fait penser à la pièce de théâtre «J'y suis j'y reste», jouée à Port-au-Prince à la fin des années 1970 (acteurs, Denise Pétrus-Dupont, Lionel Benjamin, Georges Michel, Paulette Poujol- Oriol, etc.).
(**) Nous venons d'apprendre (26 décembre) que le Président a fait son choix: c'est Evans Paul qu'il a désigné comme son futur premier ministre.

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