La commission consultative a remis son rapport [*] hier, 9 décembre 2014.
Le Coin de Pierre - politique le reproduit ci-après.
***
RECOMMANDATIONS DE LA COMMISSION CONSULTATIVE
Sommaire
Contexte
général
A.
Les constats
B.
Cadre de résolution de la crise
1. Nature de la crise et de la solution
2. Objectif général
3. Objectifs spécifiques
4. Délai de mise en oeuvre
C.
La solution proposée
1. Les mesures d’apaisement
2. Les mesures conjoncturelles
3. Les mesures structurelles
4. Des sacrifices patriotiques
5.
Calendrier d’exécution
PRÉAMBULE
Les quatre
éléments suivants constituent du cadre du présent document :
- L’arrêté présidentiel en date du 28 Novembre 2014 portant création de la «Commission consultative».
- La mission et le mandat confiés à cette Commission Consultative sont : «d’identifier la solution la plus crédible aux yeux de la nation, en vue d’une sortie de crise».
- Les résultats des consultations menées par le Président de la République avec les différents secteurs de la vie nationale entre le 22 septembre et le 24 novembre 2014 constituent la principale base de travail de la Commission.
- Les travaux effectués par la Commission entre le 1e et 8 décembre 2014.
A. LES
CONSTATS DE LA COMMISSION
- Le non‐renouvellement du personnel politique du corps législatif et des collectivités territoriales dans les délais prévus par la constitution a conduit à un fonctionnement boiteux des institutions de l’Etat au cours des deux dernières années.
- Le report des élections initialement prévues en octobre 2014 fait planer le spectre d’un dysfonctionnement du Parlement à compter du 12 Janvier 2015.
- La perte de légitimité et de crédibilité du Conseil Supérieur du Pouvoir Judicaire (CSPJ) suite aux contestations de la procédure de nomination de certains juges à la Cour de Cassation, dont le Président.
- La dénonciation par les partis politiques de l’opposition et les organisations des droits humains de la détention arbitraire de nombreux citoyens assimilés à des « prisonniers politiques ».
- La dégradation des conditions de vie des couches défavorisées accentuée au cours des derniers jours par une dépréciation de la monnaie nationale.
- L’intensification et l’amplification des manifestations de rue témoignent d’un mécontentement grandissant au sein de la population.
- De l’avis de plusieurs secteurs intéressés par la question électorale, la non‐tenue des élections en octobre 2014 entraîne la caducité du CEP actuel.
- La mise en place de cartels d’agents exécutifs intérimaires et la nomination de juges partisans, sont assimilées à une mainmise de l’Exécutif sur l’appareil judiciaire et les collectivités territoriales dans la perspective des prochaines élections.
- La perception d’une politisation de la Police Nationale d’Haiti (PNH) suscite de la méfiance et des doutes sur la possibilité de tenir dans le pays des élections démocratiques, libres, honnêtes et inclusives.
- Le Premier Ministre a exprimé à la commission sa volonté de contribuer au dénouement de la crise préélectorale actuelle en démissionnant de son poste sur demande expresse du Chef de l’état.
- La crise préélectorale actuelle a des connotations à la fois conjoncturelle et structurelle. Une solution pour être durable doit toucher de façon simultanée les aspects conjoncturels et les aspects structurels.
B. CADRE DE
RÉSOLUTION DE LA CRISE
1. Nature de
la crise et nature de la solution
Le pays
fait face à une crise de nature conjoncturelle et structurelle. Chaque groupe a
tendance à privilégier la solution (conjoncturelle ou structurelle) conforme à ses
intérêts particuliers.
La pratique
du non‐respect de la parole donnée par les uns et les autres depuis des
décennies a
contribué à
créer un climat de méfiance presque généralisé au sein de la population et des
forces politiques en présence. Ce qui rend ardu et difficile la recherche de
consensus autour de l’intérêt général.
Pour avoir
les meilleures chances de succès, la solution proposée doit être rationnelle,
applicable et acceptable par les différents secteurs du pays en tenant compte
de la nécessaire collaboration entre les trois (3) pouvoirs de l’État. « La
solution la plus crédible aux yeux de la nation » doit être celle qui donne la
stabilité aux trois (3) pouvoirs de l’État pour assurer la paix sociale et
servir le peuple haïtien
2. Objectif
général
A la
lumière des constats susmentionnés , la Commission croit que, pour éviter une
aggravation de la situation actuelle, « la solution la plus crédible pour la
sortie de crise » doit permettre un retour, dans un délai raisonnable, à la
normalité constitutionnelle et au bon fonctionnement des institutions démocratiques
et républicaines.
3. Objectifs
spécifiques
Les
objectifs spécifiques de la solution proposée par la commission sont de :
a) Établir un dialogue
permanent entre les trois(3) pouvoirs de l’État, particulièrement entre le pouvoir
exécutif et le pouvoir législatif.
b)
Permettre un
compromis historique entre les forces politiques qui privilégient les élections
comme moyens de conquête du pouvoir.
c)
Former un
gouvernement de consensus avec les composantes politiques, particulièrement
celles représentées au parlement.
d)
Créer un climat
favorable pour la tenue d’élections inclusives, crédibles et sincères.
e)
Rétablir la
confiance des citoyens dans les instances judiciaires et dans l’institution
policière.
4.
Délai de mise en œuvre de la solution proposée
La
dégradation de l’environnement politico‐social exige plusieurs mesures
d’apaisement et de
redressement
avant les fêtes de Noël. Il est donc impératif de trouver
un compromis politique avant la date du 12 janvier 2015.
C.
LA SOLUTION PROPOSÉE
Fort
de toutes ces considérations, la Commission a identifié une solution comme
étant « la plus crédible aux yeux de la nation ». Elle prend appui sur ce
principe émané de notre culture et de notre sagesse populaire: « boukannen tann bouyi ».
La
solution se présente sous la forme du plan et du calendrier suivants et
s’articule autour de mesures d’apaisement, de mesures
conjoncturelles, de mesures structurelles et
de sacrifices patriotiques.
Ces quatre (4) éléments constituent un tout.
1. Mesures d’apaisement
Les
mesures d’apaisement ont pour but de démontrer la volonté des trois (3)
pouvoirs de l’état de réduire les tensions qui aujourd’hui divisent la nation.
Elles comprennent :
a)
La
libération immédiate, à travers le pays, des « prisonniers politiques » qui
n’ont pas été, à date, déférés devant leur juge naturel et un arrêté de grâce
en faveur de tous ceux qui sont déjà engagés dans une instance judiciaire.
b)
La
démission du Premier Ministre et de son gouvernement. Cette démission ouvre la
voie au Président de la République pour engager les négociations en vue de la
désignation, au plus vite, d’un Nouveau Premier Ministre et la formation d’un
gouvernement de Consensus.
c)
La
démission du Président du Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire (CSPJ).
d)
La
démission des membres du Conseil Électoral Provisoire (CEP). Ce geste
patriotique devrait permettre la formation d’un nouveau CEP.
e)
L’adoption
d’une trêve par les différentes composantes politiques, permettant ainsi de
créer le climat de dialogue.
f)
L’organisation
d’une rencontre entre le Président de la République et les Présidents des deux chambres
dans le cadre de l’appréciation et la mise en œuvre de la présente solution.
2. Mesures conjoncturelles
Les
mesures conjoncturelles ont pour but de permettre le rétablissement du bon
fonctionnement des pouvoirs de l’État. Elles comprennent :
a.
La
nomination du premier ministre et la formation du gouvernement de consensus,
issues de négociations entre le Président de la République et les composantes
politiques, notamment celles de l’opposition.
b.
La
convocation de la Chambre des Députés en session extraordinaire portant sur un
agenda précis, comprenant entre autres : le vote des amendements à la loi
électorale de 2013 et l’adoption de la déclaration de politique générale du
nouveau gouvernement.
c.
Un
accord politique pour réaliser de bonnes élections inclusives et harmoniser le
temps électoral au temps constitutionnel.
d.
La mise
en place du Conseil Électoral Provisoire (CEP) selon l’esprit de l’article 289
de la Constitution de 1987 et ayant pour mission d’organiser au plus tôt les
élections législatives et des collectivités territoriales, et les élections
présidentielles, le dernier dimanche du mois d’Octobre 2015. Cette démarche a
pour objectif de rétablir le fonctionnement des institutions démocratiques.
3. Mesures structurelles :
Les
mesures structurelles ont pour objectif de renverser les barrières qui
constituent depuis plus de Vingt Cinq (25) ans un obstacle à la stabilité et à
la gouvernabilité du pays. Elles seront menées par le Gouvernement
de Consensus. Elles comprennent :
a)
La
convocation des États Généraux de la Nation afin d’établir un Pacte National Patriotique qui devrait inclure :
i)
Un
protocole de bonne gouvernance portant sur la rationalisation de la gestion
publique et la moralisation du fonctionnement des institutions publiques.
ii)
Un
protocole de croissance et de compétitivité en vue de la création d’emplois
durables, la promotion et la protection de la production nationale et la
réduction de la pauvreté;
iii)
Un protocole
de révision Constitutionnelle qui devra définir le cadre dans lequel pourront
s’opérer des amendements de la constitution. En aucun cas, le Président en exercice
ne pourra bénéficier de ces éventuels amendements.
b)
Les
réformes nécessaires au niveau de l’appareil judiciaire pour rétablir la
confiance de tous les citoyens dans le système. Ces réformes passent
obligatoirement par la reconstitution du CSPJ et la mise en place d’un
processus d’évaluation non partisan des juges du système judiciaire.
c)
Le
renforcement de la Cour Supérieure des Comptes dans sa mission de contrôle et
de vérification des institutions publiques.
Les mesures structurelles ne pourront être implémentées qu’après
la mise en place des mesures conjoncturelles.
4. Des sacrifices patriotiques
L’application
de cette solution exige de tous les acteurs des sacrifices, permettant un
résultat gagnant-gagnant. Il ne doit y avoir ni vainqueurs ni vaincus, mais
plutôt un engagement de tous les citoyens.
Du
Président de la République :
Reconnaître que le pays connait une situation grave qui réclame un acte de
grandeur patriotique en invitant même ses adversaires politiques à intégrer le
pouvoir exécutif et en s’engageant formellement à ne prendre aucun décret‐loi,
sauf ceux qui seraient liés aux élections durant la période de vide
parlementaire.
Du
Premier Ministre :
Comprendre qu’aujourd’hui sa démission constitue un élément essentiel dans la recherche
de l’apaisement.
Des
Sénateurs et des Députés: Voter
la loi électorale amendée de 2013 ainsi que la déclaration de politique
générale du Gouvernement de Consensus, issu des négociations politiques, sitôt
la convocation en session extraordinaire.
Du
Président du CSPJ : Faire
un geste patriotique en offrant sa démission au Président de la République pour
faciliter le dénouement de la crise.
Des
Conseillers Électoraux : En
dépit de leur bonne volonté, participer au dénouement de la crise en offrant
leur démission.
Des
Responsables de Partis politiques:
Respecter la légitimité constitutionnelle du Président de la République;
S’engager à accepter la présente solution en répondant à l’invitation du
Président de la République pour une négociation dans la sérénité et le respect
mutuel et sans préalables ni conditions additionnelles autres que celles
contenues dans le présent document.
Du
Peuple Haïtien: Reconnaître que l’heure est
grave et que tout un chacun doit apporter sa
contribution
à l’édification d’une société plus juste et plus équitable; Reconnaître que la
liberté des uns passe par le respect des autres; Accepter que seule une
solution issue d’un dialogue par des Haïtiens, pour des Haïtiens et avec des
Haïtiens apportera la réduction de la pauvreté dans le respect des libertés individuelles
acquises déjà au prix d’énormes sacrifices.
5. Calendrier de mise en oeuvre de la solution
11
‐17 décembre 2014
- La Commission remet son rapport au Président de la République
- Démission du Premier Ministre et du Président du CSPJ
- Consultation du Président de la République avec les deux présidents de Chambres sur la désignation d’un nouveau Premier Ministre
- Rencontre du Président de la République avec les partis politiques représentés au Parlement.
- Démarrage des négociations entre le Président de la République et les composantes politiques
- Nomination d’un nouveau Premier ministre
- Convocation de la Chambre des Députés à l’extraordinaire
17‐24 décembre 2014
- Signature du pacte de consensus entre le Président et les partis politiques
- Démission du CEP
- Consultation sur la mise en place d’un nouveau CEP
- Vote de confiance de la politique générale
- Installation des Ministres du gouvernement de consensus
- Vote des amendements à la loi électorale par le Sénat et transmission à la chambre basse
- Ratification des Ambassadeurs par le Sénat
- Adoption et publication de la loi électorale
- Nomination du Conseil Electoral Provisoire
12
janvier 2015
- Déclaration du Chef de l’État sur la nécessité d’organiser les États Généraux de la Nation.
- Organisation d’un service religieux sous les auspices de Religions pour la Paix Haïti.
7
février 2015
- Mise en branle des États Généraux de la Nation par le gouvernement de consensus.
Fait
à Port au Prince, le 8 Décembre 2014
Odette
Roy-Fombrun ____________________________
Me
Gérard Gourgue _____________________________
Mgr
Patrick Aris _______________________________
Mgr
Ogé Beauvoir ______________________________
Pasteur
Chavannes Jeune ________________________
Paul
Loulou Chéry ______________________________
Charles
Suffrard ________________________________
Gabriel
Fortuné ________________________________
Rony
Mondestin ________________________________
Evans
Paul ____________________________________
Réginald
Boulos ________________________________
FIN
DU TEXTE
___________________________
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