vendredi 30 mars 2012

Haïti/ «Avec la Constitution de 1987 le pays sera in-gou-ver-na-ble.»

Par Dr. Pierre Montès


C'est ce qu'affirmait le Professeur Hubert De Ronceray en 1987, dans les jours qui ont suivi l'adoption de la Constitution par référendum le 29 mars 1987.

Le sociologue De Ronceray avait bien vu. Ses prédictions se sont révélées vraies pendant les 25 dernières années. Elles continueront de l'être dans le futur tant que cette constitution reste en vigueur, que ce soit sous sa forme amendée dans la confusion et suivant un processsus flou en 2011, que ce soit sous toutes autres futures formes amendées.

Je me rappelle très bien ces paroles du Dr. De Ronceray en 1987.

La Constitution a donc 25 ans. Vingt-cinq ans perdus à la violer parce qu'elle est une loi inapplicable et parce que les haïtiens, depuis 1804, ne se sont pas encore entendus de bonne foi sur une manière de faire fonctionner démocratiquement les institutions.

Il ne s'agit pas d'amender la Constitution pour tenter de l'améliorer. Elle est trop rigide et irréaliste. Il faut la rejeter et repartir à zéro: le régime semi-présidentiel, semi-parlementaire ne marche pas. Il faut un document plus simple et bien conçu: «Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement et les mots pour le dire arrivent aisément

Il faut donc écrire une nouvelle constitution plus claire, plus simple, plus courte, plus facile d'application et qui soit le fruit d'un consensus entre tous les haïtiens.

En Amérique, il y a deux régimes politiques: le régime présidentiel dans certains pays, le régime parlementaire dans d'autres (*). Haïti est le mouton noir de l'Amérique, voire le mouton noir du monde entier.

Dans le cas d'Haïti, j'aurais privilégié l'introduction d'un système parlementaire comme dans les antilles anglophones,ou comme au Québec. Mais Haïti n'est pas encore prête pour un tel système. Il lui faut donc un système présidentiel et, sans premier ministre, s'il vous plaît. 

Haïti regorge de belles têtes, hommes et femmes, qui sont plus utiles au reste du monde qu'à leur propre pays, qu'elles soient dans la diaspora ou qu'elles soient sur le terrain. C'est triste de faire un tel constat: je n'aime pas ça  «pantoute».

Et quand un haïtien veut changer les choses, les autres, voire presque tous les autres, se liguent contre lui. Un exemple actuel: le cas du Président Michel Martelly vs. le Parlement.

Le plus grand problème d'Haïti, c'est que chacune de ses belles têtes pense que c'est elle, et elle seule, qui doit être à la tête du pays pour qu'il soit «bien gouverné». Chaque belle tête pense que c'est elle, et elle seule, qui ait «la» solution aux problèmes d'Haïti. Et, au lieu de faire équipe avec les autres belles têtes pour faire avancer leur pays, quelle que soit la couleur (politique ou épidermique) du chef de l'État en fonction, chaque belle tête préfère faire obstruction aux actions du chef de l'État et de son gouvernement. Dans ces conditions, les puissances amies d'Haïti s'imposent comme arbitres, le surarbitre étant les États-unis d'Amérique. 

Il faudrait entamer des échanges entre haïtiens, initier un dialogue national, pour définir sans préjugés ce que l'on devrait faire pour qu'Haïti commence à fonctionner «comme du monde», c'est-à-dire, comme le reste de l'Amérique, comme le reste du monde.

Une bonne constitution (de préférence pas très longue) serait la pièce maîtresse, la clef de voûte (the keystone) dans cette marche d'Haïti vers la modernité en 2012.


En attendant, peut-être, faudrait-il que les puissances amies d'Haïti, les arbitres et le surarbitre, permettent au Président Martelly de se transformer, c'est-à-dire, de passer de l'homme mou («papa gâteau», «papa Pétion bon kè») à l'homme fort («papa Christophe pi di») qui n'ait pas peur de «fouetter» (2), comme des animaux, certains des parlementaires, c'est-à-dire, ceux qui se  comportent comme des dinosaures.

Pour écrire cette nouvelle constitution, il n'y a nulle doute dans mon esprit que Madame Myrlande Manigat, professeure, constitutionnaliste, serait la personne indiquée pour présider l'entité qui serait chargée de produire ce document.

Quant au dialogue national, le Président Martelly a toute la bonne volonté, toute l'énergie, toute la ténacité requises pour diriger/inspirer l'équipe qui serait chargée d'organiser les échanges haitïano-haïtiennes durant son quinquennat.

Les échanges constants entre l'équipe chargée d'écrire la nouvelle constitution et l'équipe chargée d'organiser le dialogue national seraient indispensables. 
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7 août 2011.

(2) Le mot «fouetter» est ici utilisé au sens figuré, c'est-à-dire, le sens qu'a le mot «fouetter» dans la bouche du brillant animateur de l'émission «C'est bien meilleur le matin» de Radio-Canada/radio, le morning man René Homier-Roy.

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