samedi 7 février 2009

HAÏTI/Système de santé publique/ Un malade de plus en plus grave !

Par Alix Laroche
Le Matin du 3 février 2009

Le ministre de la Santé publique et de la Population (MSPP), Dr Alex Larsen, a présenté, ce lundi 2 février, au cours d’une conférence-débat, le bilan de ses cent premiers jours à la tête du ministère et dégagé des perspectives pour cette nouvelle année fiscale 2008-2009. Cette rencontre avec la presse rentre dans le cadre du programme « Bilan et perspectives des institutions de l’État », initié par le Centre d’information et de communication publiques (CICP) du ministère de la Culture et de la Communication (MCC) en vue de rendre plus accessibles les informations relatives aux actions gouvernementales.
À la présentation de la feuille de route et du budget 2008-2009 du ministère, le ministre de la Santé publique et de la Population (MSPP), Dr Alex Larsen, s’est dit sérieusement préoccupé par la détérioration de la situation sanitaire dans le pays. Les structures sanitaires de référence placées dans les dix départements géographiques du pays, particulièrement les hôpitaux, notamment l’Hôpital de l’Université d’État d’Haïti (HUEH), « demeurent les plus grands malades du système sanitaire haïtien ».
Selon le ministre Larsen, « comparativement aux autres pays de la Caraïbe, notre système sanitaire est dans un état déplorable ». S’appuyant sur des statistiques, il en a dressé, ce lundi, un sombre tableau. De l’avis d’un technicien médical qui a requis l’anonymat, nombreuses sont les barrières pouvant expliquer les difficultés et les inégalités d’accès aux soins de santé dans le pays. Il a cité, entre autres, l’éloignement des centres de santé, le transport difficile, le dysfonctionnement des structures sanitaires, les facteurs culturels, la discrimination sexuelle.
Description de la situation actuelle
Selon Alex Larsen, depuis son arrivée au ministère en septembre dernier, il a trouvé une situation des plus difficiles au point de vue sanitaire. À en croire le ministre de la Santé publique, « Haïti présente un taux de mortalité maternelle lors des accouchements évalué à 630 morts pour 100 mille naissances vivantes. La mortalité infantile s’élève à un taux de 57 morts pour 1 000 naissances ». « Je dois avouer, a-t-il déploré, que c’est le taux le plus élevé de la Caraïbe. Ce qui nous montre clairement que la situation sanitaire n’est pas normale en Haïti. Nous sommes les plus mal foutus de la région. C’est une situation inacceptable », a-t-il lâché.
« Nous avons, a-t-il poursuivi, 3 % d’Haïtiens qui vivent actuellement avec le virus du VIH/Sida. Pour ce qui concerne les cas des maladies pulmonaires (tuberculose…), on a recensé un total de 180 pour 100 mille habitants. À travers le monde, a informé Alex Larsen, c’est un taux très élevé parmi les pays où l’on enregistre un taux de tuberculose le plus élevé. 40 % de la population n’ont pas accès aux soins de santé. Il n’y a que, a-t-il indiqué, 60 % seulement de femmes qui accouchent dans des conditions plus ou moins acceptables. Au point de vue de la protection des enfants, 41 % seulement ont été vaccinés. Toujours au point de vue d’accès à la santé, le besoin de 40 % de femmes du pays n’est pas satisfait. »
De l’avis du ministre, c’est pour la première fois que, depuis 1980, le taux de la malaria est aussi élevé dans le pays. Abordant la question des dépenses au point de la santé publique, le ministre Larsen a indiqué que 40 % dépend de la population.
Selon Alex Larsen, une enquête conduite par son ministère a recensé près de 243 sections communales dépourvues de structure sanitaire. En plus d’une insuffisance budgétaire, le système fait face à une inadéquation accrue de ressources humaines par rapport aux besoins sanitaires du pays. Nous enregistrons également un sérieux déficit du point de vue d’officiers sanitaires. « Outre une carence de personnel formé pour la maternité, le pays dispose seulement de 50 officiers sanitaires auxiliaires », a appris Dr Larsen. « Chose certaine, a-t-il avancé, ces cadres constituent la base dans la lutte préventive contre les maladies. »
Le ministre Alex Larsen a profité de l’occasion pour dénoncer un manque de coordination dans le mode d’intervention des partenaires internationaux en ce domaine. « Je pense qu’il y a une sorte de désordre au niveau des ONG. On a l’impression que chaque ONG fait ce qu’elle veut, comme elle veut », a-t-il déploré, avant de souligner le manque d’éducation de la population qui ne protège nullement son environnement immédiat.
Un plan pour pallier la situation
Soucieux de porter une réponse à la situation, a-t-il dit, trouvée depuis son arrivée en septembre au ministère, un plan stratégique a été élaboré en vue d’améliorer la situation. Aussi, envisage-t-il de « réduire le taux de mortalité au moins à 50 %, diminuer le nombre de personnes infectées du VIH/Sida à 30 % et voir la possibilité d’éradiquer définitivement la propagation du virus au sein de la population. Mais aussi, réduire le taux de mortalité infantile et juvénile à 50 % et la tuberculose à 30 % ».
Pour parvenir à des résultats probants, les responsables sanitaires envisagent, a expliqué le ministre de la Santé publique et de la Population, « de décentraliser le système dans l’ordre ; d’améliorer la qualité des soins de santé à tous les niveaux dans le pays ; de construire des structures de santé et revitaliser les hôpitaux de référence, afin de desservir convenablement la population et, enfin, de régulariser le secteur ».
Les priorités
D’après le Dr Larsen, ses priorités pour l’année 2008-2009 consistent :
1) en la mise en place d’un système d’information sanitaire ;
2) le développement des ressources humaines à tous les niveaux ;
3) la disponibilité des médicaments essentiels ;
4) rationaliser la gouvernance du ministère.
« On projette également de faire face à des maladies prioritaires, entre autres, la malaria, la tuberculose et le sida », a informé le ministre Larsen, indiquant au passage que des fours crématoires seront disponibles dans toutes les structures sanitaires afin de procéder à la brûlure des déchets sanitaires.
Les attentes du plan vise le fonctionnement normal des structures sanitaires à tous les points de vue, selon le Dr Larsen, qui n’a pas manqué de faire part des réalisations du ministère durant la période post-cyclonique. Pour réaliser leurs objectifs, les responsables du ministère de la Santé publique prévoient un budget de fonctionnement et d’investissement évalué à 8 milliards 796 millions 7 mille 861 gourdes. De ce fonds, 2 % seulement proviennent du Trésor public, le reste dépend totalement des bailleurs de fonds internationaux.
Par Alix Laroche
mardi 3 février 2009
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