Source: omegamilitaryconsultant.com
Par Parnell Duverger
Chairman, Omega World News
Economiste Principal, Omega Military Consultants
Professeur Adjoint en Science Economique, Broward College
p_duverger@yahoo.com
p_duverger@omegaworldnews.com
Je le voyais et l’écoutais à la télévision pour la première fois, et en direct ce jour-là, de Washington, D.C., un jour ou deux après la chute du gouvernement de Mr. Jean Claude Duvalier, dans une entrevue qu’il accordait à une journaliste nord-américaine dont j’oublie le nom en ce moment, tant j’ai encore de la difficulté à me relever du terrible choc de cette pénible nouvelle qu’un ami commun, et d’une grande délicatesse, tenait à me délivrer lui-même très tôt dans la matinée de ce mercredi 16 juin, 2010, de crainte peut-être que je ne l’apprenne soudainement des média, dans une annonce publique qui ne saurait trop tarder. Marc Ls. Bazin n’était plus.
Durant cette entrevue, je me rappelle très bien encore aujourd’hui, il articulait une pensée politique nouvelle pour Haïti, que seule la démocratie, soutenue par les institutions de la liberté et de l’état de droit, permettra l’émergence des compétences et talents individuels dotés du sérieux et de l’honnêteté nécessaires à la gestion des ressources physiques et humaines, que nous devrons utiliser avec efficacité et efficience, pour créer et mieux distribuer l’incontournable richesse économique qui devra nous aider à nous défaire de cette honteuse réputation d’être le pays le plus pauvre de notre hémisphère. Aux Haïtiens, il proposait une nouvelle formation politique, le Mouvement pour l’Instauration de la Démocratie en Haïti, dans le creuset duquel leurs énergies créatrices seraient mises au service de leur patrie. A Haïti, il offrait un leadership nouveau, compétent, honnête et rassembleur, par lequel il s’engageait à « servir son pays en tout temps, en tous lieux et en toutes circonstances. » A moi, il donnait toutes les raisons de croire en un avenir de liberté et de prospérité pour mon pays.
Devant mon petit écran, je regardais encore ce tribun d’une grande et rare éloquence offrir à son pays ses grandes qualités de gestionnaire, d’économiste et d’analyste financier, bien reconnues dans plusieurs pays d’Afrique auxquels il avait montré, avec énormément de succès et d’espoir, la voie du développement économique, en tant que haut fonctionnaire délégué de la Banque Mondiale qui ne tarissait pas d’éloges à son sujet et lui confiait des postes de plus en plus prestigieux de direction, jusqu’à faire de lui son ambassadeur aux Nations Unies. Pressé par l’appel incessant du lambi qui n’avait jamais arrêté d’angoisser son âme de patriote Haïtien, et qui ramenait toujours son esprit à l’examen minutieux de l’affreuse pauvreté de sa terre natale, et des abominables souffrances de ses compatriotes, Marc Ls. Bazin entreprit de se rendre à Haïti, convaincu que le moment était venu de donner entièrement au peuple Haïtien ce que la Banque Mondiale avait su obtenir de lui en faveur de ses frères africains, et qui demeurent les outils les plus performants de transformation radicale d’une nation pauvre et gérée par des traditions de plus en plus inexplicables, en une société moderne et prospère, fraternelle et solidaire, en occurrence la démocratie, la liberté institutionnalisé e, et l’état de droit qui fait de la corruption et des abus de droits humains, des anomalies entièrement répudiées et consignées à un passé irrémédiablement révolu.
Revenons à cette entrevue télévisée de février 1986. A l’invitation que Mr. Bazin lançait à tous de se joindre à lui pour construire une nouvelle société Haïtienne qui réussirait à relever le défi du développement économique et du progrès social dans notre pays, je répondis immédiatement. Tout de suite après l’émission, j’ai pu retracer à Washington D.C. cette journaliste avec laquelle il s’était entretenu, et lui ai laissé mon numéro de téléphone qu’elle communiqua à Mr. Bazin, tel que promis. Durant notre conversation le lendemain, Mr. Bazin m’accueillit au sein de son équipe du MIDH, après qu’il eût requis de moi une brève présentation de mon parcours académique et professionnel, pour me demander ensuite de contacter sans délai Mr. Edvard Despeignes, à Montréal, au Canada où je vivais alors, pour les suites nécessaires.
Ainsi débutèrent une collaboration fructueuse, une sincère amitié, ainsi qu’une admiration et une grande confiance mutuelles, qui me placèrent au sommet du directoire du MIDH au Canada et en Haïti, comme vice-président et assistant de Mr. Despeignes pour le Canada, représentant principal du parti à Ottawa et pour la région Outaouaise du Québec, membre du Conseil National du MIDH, et plus tard, membre du cabinet particulier du Premier Ministre Marc Ls. Bazin et du Ministre des Finances Wiener Fort, et responsable de la liaison entre le bureau du Premier Ministre et celui du Ministre des Finances, et finalement, chargé de mission du Premier Ministre et consultant au Grand Quartier Général des Forces Armées d’Haïti pour la gestion des crises politiques et économiques liées aux violations répétées de la constitution de 1987 par le Président de la République, son départ pour l’exil et sa volonté de retourner en Haïti sans offrir les garanties de sa résolution à mettre un terme à ses appels à la violence et à ses menaces à peine voilées contre les membres de l’institution militaire.
A partir de cette période d’implantation du MIDH au Canada, j’ai eu toutes les opportunités d’apprendre à connaître, à admirer et à respecter Mr. Marc Ls. Bazin, ce monument de la nature qui rassemblait en sa personne une énorme capacité analytique, une similaire aptitude de synthèse, une intelligence naturelle des théories et pratiques de la science économique, ainsi que de leur applicabilité générale ou limitée dans l’explication des faits et évènements économiques en Haïti, et enfin, une remarquable simplicité de langage qu’il savait bien mettre au service d’une formulation intelligible pour tous des problèmes économiques, politiques ou sociaux les plus complexes. Ma collaboration avec Mr. Bazin fut largement facilitée, je crois, non seulement par une convergence de philosophie politique, mais aussi par une affinité d’intelligence économique qui reconnaît au mécanisme des prix du marché libre une fonction essentielle de réallocation continuelle des ressources économiques vers les activités auxquelles une société libre accorde les plus grandes valeurs, et qui aussi voit dans le marché économique une des plus importantes institutions de la liberté. Ce qui nous unissait aussi était ce credo dans la nécessité de « miser sur l’homme », c'est-à-dire dans cette croyance bien raisonnée qu’il fallait viser le développement humain le plus large, pour que les bénéficiaires de la transformation économique et sociale, par l’accumulation des richesses et la démocratie, en soient à la fois les sujets, les acteurs, ainsi que la grande finalité.
Fort de ses profondes convictions philosophiques, économiques, politiques et démocratiques, Mr. Marc Ls. Bazin reconnaissait aussi l’impérieuse nécessité de promouvoir et réaliser la cohésion du tissu social Haïtien par le dialogue permanent et la concertation. Connaissant bien la nature de ses propres idées, des thèses qui leur sont contraires, ainsi que de leur évolution dans la quête humaine du savoir universel, Mr. Marc Ls. Bazin pouvait partir à la conquête des vieux démons de nos divisions politiques en identifiant clairement les espaces de compréhension mutuelle et de désaccords profonds, idéologiques ou autres, ainsi que les intérêts et contraintes de chaque acteur politique, incluant le gouvernement, chacun dans sa démarche individuelle visant à tirer le drap de son côté et/ou satisfaire sa propre chapelle ou base politique. Dès lors, il s’ingéniait à présenter des propositions qui reconnaissaient les besoins essentiels de chacun, ainsi que les intérêts du peuple Haïtien, facilitaient une sortie de crise sans que qui que ce soit n’ait à perdre la face, tout en faisant aussi ressortir clairement les coûts politiques, économiques ou sociaux de tout échec du processus de dialogue et de son fruit, la concertation, autant pour le pays que pour les protagonistes eux-mêmes.
Tout naturellement, c’étaient-là les démarches d’un homme qui s’était proposé de travailler à instaurer la démocratie en Haïti, et qui nous montrait à nous du MIDH, à notre peuple tout entier, à la classe politique, aux comédiens qui se disent être un gouvernement, et à notre jeunesse plus particulièrement à laquelle il ambitionnait d’inculquer aussi « les vertus du corps, les vertus de l’engagement, les vertus du mérite », la voie royale qui devra conduire notre pays à la pleine réalisation de son potentiel. Les pierres dont est pavée cette voie royale sont la démocratie, la liberté économique, le mécanisme des prix du marché économique, la création d’une richesse mieux distribuée, et l’état de droit, pour vivre ensemble et construire ensemble, dans un dialogue permanent et dans la concertation.
Au nom de ces principes du dialogue permanent et de la concertation, et fidèle à son engagement de servir son pays « en tout temps, en tout lieu et en toutes circonstances », Marc Ls. Bazin prit l’initiative de créer « l’Alliance Nationale pour la Démocratie et le Progrès » avec le Panpra de Mr. Serge Gilles et le MNP-28 de l’ingénieur Dejean Bélizaire, pour les élections générales de 1990. Au cœur de la crise politique du début des années 90s, Marc Ls. Bazin accepta le poste de Premier Ministre et travailla avec les militaires, pour « combattre l’embargo » infligé à notre petite économie forcer le retour en Haïti de Mr. Aristide, et on le retrouvera quelques années plus tard dans un poste de Ministre au sein d’un gouvernement dirigé par Mr. Aristide, encore pour travailler « contre un autre embargo » qu’on voulait imposer cette fois-ci au gouvernement de ce dernier. Au nom de la démocratie, du dialogue et de la concertation, on le retrouvera une autre fois Ministre des Négociations, pour tenter de trouver une entente salutaire pour le pays au conflit opposant Mr. Aristide, l’OPL et la Convergence Démocratique. Aux présidentielles de 2006, il sera le candidat d’une nouvelle alliance dénommée « Union pour Haïti », née d’un rapprochement entre le MIDH et Fanmi Lavalas, encore une fois au nom du dialogue permanent et de la concertation, qui seront aussi les motifs de sa participation recherchée à un colloque réunissant en 2009, à Santo Domingo, un groupe restreint d’activistes Haïtiens qu’il a su honorer également par une contribution écrite très pertinente sur les besoins économiques de notre pays.
Si, face à une armée étrangère au service de l’esclavage, l’armement de guerre et le courage du marron inconnu étaient indispensables aux meurtriers combats que devaient livrer nos pères et mères fondateurs « pour nous créer une patrie où le nègre Haïtien se sent réellement souverain et libre », pour le combat du développement économique et du progrès social, à l’heure mondiale de la globalisation, de la compétitivité économique accrue et de l’internet, des nouveaux défis qui appellent à la solidarité de tout le genre humain, les armes de la démocratie triomphante des tares économiques et sociales demeurent celles que privilégiait Mr. Marc Ls. Bazin, le dialogue permanent et la concertation, avec lesquels il nous exhortait au MIDH de « faire de la politique pour servir le peuple, et ne jamais se servir du peuple pour faire de la politique. »
Enfin, après des livres comme « Un Programme d’Action pour l’Avenir », après « Miser sur l’Homme », après « Le Défi Démocratique », après « Sortir de l’Impasse », après « Démocratie sous Pression », ou encore des articles comme « Des Idées pour l’Action » écrit tout récemment pour Le Nouvelliste, on reconnaîtra que le dialogue permanent et la concertation sont toujours demeurés au cœur de la méthode de Marc Ls. Bazin, comme outils d’une praxis démocratique visant à transformer l’état et l’économie de notre pays au bénéfice de notre peuple. Comme il le rappelait lui-même de temps en temps à certains critiques qui ne soufflaient d’ailleurs que du vent, mais qui dit mieux ?
Pilate aura beau se laver les mains, toujours on dira : « il a souffert sous Ponce Pilate. » De cet homme vertical, honnête et intègre, aux manières princières, aux actes courageux, qui eut à dire un jour : « je n’ai jamais rencontré un seul défi que je n’aie éprouvé le besoin de relever », la postérité répètera toujours après lui et avec lui, ses propres mots, pour affirmer :
« Bazin : ni voleur, ni assassin, ni ignorant, il a tout donné, il a beaucoup reçu. »
Pour avoir rencontré et connu notre Marc Ls. Bazin national, et parce que j’ai beaucoup reçu de lui, je suis un meilleur homme aujourd’hui. Et, parce que sa vision était juste, et son travail si laborieux, si riche et désintéressé, je peux déjà voir se dissiper les ténèbres dans mon pays.
Merci, et adieu Mr. Bazin.
Que Dieu vous garde dans la paix de sa demeure.
Que la lumière éclaire Haïti toute entière !
A la veuve de Marc Ls. Bazin, à tous ses proches, alliés et amis,
A Mr. Patrick Michel, et à tous les autres collaborateurs de Marc Ls. Bazin,
A tous les membres de cette grande famille politique que demeure le MIDH,
A tous ceux qui ont cheminé et travaillé avec le fondateur du MIDH,
J’offre mes sincères condoléances.
Parnell Duverger
20 juin 2010
Chairman, Omega World News
Economiste Principal, Omega Military Consultants
Professeur Adjoint en Science Economique, Broward College
p_duverger@yahoo.com
p_duverger@omegaworldnews.com
Je le voyais et l’écoutais à la télévision pour la première fois, et en direct ce jour-là, de Washington, D.C., un jour ou deux après la chute du gouvernement de Mr. Jean Claude Duvalier, dans une entrevue qu’il accordait à une journaliste nord-américaine dont j’oublie le nom en ce moment, tant j’ai encore de la difficulté à me relever du terrible choc de cette pénible nouvelle qu’un ami commun, et d’une grande délicatesse, tenait à me délivrer lui-même très tôt dans la matinée de ce mercredi 16 juin, 2010, de crainte peut-être que je ne l’apprenne soudainement des média, dans une annonce publique qui ne saurait trop tarder. Marc Ls. Bazin n’était plus.
Durant cette entrevue, je me rappelle très bien encore aujourd’hui, il articulait une pensée politique nouvelle pour Haïti, que seule la démocratie, soutenue par les institutions de la liberté et de l’état de droit, permettra l’émergence des compétences et talents individuels dotés du sérieux et de l’honnêteté nécessaires à la gestion des ressources physiques et humaines, que nous devrons utiliser avec efficacité et efficience, pour créer et mieux distribuer l’incontournable richesse économique qui devra nous aider à nous défaire de cette honteuse réputation d’être le pays le plus pauvre de notre hémisphère. Aux Haïtiens, il proposait une nouvelle formation politique, le Mouvement pour l’Instauration de la Démocratie en Haïti, dans le creuset duquel leurs énergies créatrices seraient mises au service de leur patrie. A Haïti, il offrait un leadership nouveau, compétent, honnête et rassembleur, par lequel il s’engageait à « servir son pays en tout temps, en tous lieux et en toutes circonstances. » A moi, il donnait toutes les raisons de croire en un avenir de liberté et de prospérité pour mon pays.
Devant mon petit écran, je regardais encore ce tribun d’une grande et rare éloquence offrir à son pays ses grandes qualités de gestionnaire, d’économiste et d’analyste financier, bien reconnues dans plusieurs pays d’Afrique auxquels il avait montré, avec énormément de succès et d’espoir, la voie du développement économique, en tant que haut fonctionnaire délégué de la Banque Mondiale qui ne tarissait pas d’éloges à son sujet et lui confiait des postes de plus en plus prestigieux de direction, jusqu’à faire de lui son ambassadeur aux Nations Unies. Pressé par l’appel incessant du lambi qui n’avait jamais arrêté d’angoisser son âme de patriote Haïtien, et qui ramenait toujours son esprit à l’examen minutieux de l’affreuse pauvreté de sa terre natale, et des abominables souffrances de ses compatriotes, Marc Ls. Bazin entreprit de se rendre à Haïti, convaincu que le moment était venu de donner entièrement au peuple Haïtien ce que la Banque Mondiale avait su obtenir de lui en faveur de ses frères africains, et qui demeurent les outils les plus performants de transformation radicale d’une nation pauvre et gérée par des traditions de plus en plus inexplicables, en une société moderne et prospère, fraternelle et solidaire, en occurrence la démocratie, la liberté institutionnalisé e, et l’état de droit qui fait de la corruption et des abus de droits humains, des anomalies entièrement répudiées et consignées à un passé irrémédiablement révolu.
Revenons à cette entrevue télévisée de février 1986. A l’invitation que Mr. Bazin lançait à tous de se joindre à lui pour construire une nouvelle société Haïtienne qui réussirait à relever le défi du développement économique et du progrès social dans notre pays, je répondis immédiatement. Tout de suite après l’émission, j’ai pu retracer à Washington D.C. cette journaliste avec laquelle il s’était entretenu, et lui ai laissé mon numéro de téléphone qu’elle communiqua à Mr. Bazin, tel que promis. Durant notre conversation le lendemain, Mr. Bazin m’accueillit au sein de son équipe du MIDH, après qu’il eût requis de moi une brève présentation de mon parcours académique et professionnel, pour me demander ensuite de contacter sans délai Mr. Edvard Despeignes, à Montréal, au Canada où je vivais alors, pour les suites nécessaires.
Ainsi débutèrent une collaboration fructueuse, une sincère amitié, ainsi qu’une admiration et une grande confiance mutuelles, qui me placèrent au sommet du directoire du MIDH au Canada et en Haïti, comme vice-président et assistant de Mr. Despeignes pour le Canada, représentant principal du parti à Ottawa et pour la région Outaouaise du Québec, membre du Conseil National du MIDH, et plus tard, membre du cabinet particulier du Premier Ministre Marc Ls. Bazin et du Ministre des Finances Wiener Fort, et responsable de la liaison entre le bureau du Premier Ministre et celui du Ministre des Finances, et finalement, chargé de mission du Premier Ministre et consultant au Grand Quartier Général des Forces Armées d’Haïti pour la gestion des crises politiques et économiques liées aux violations répétées de la constitution de 1987 par le Président de la République, son départ pour l’exil et sa volonté de retourner en Haïti sans offrir les garanties de sa résolution à mettre un terme à ses appels à la violence et à ses menaces à peine voilées contre les membres de l’institution militaire.
A partir de cette période d’implantation du MIDH au Canada, j’ai eu toutes les opportunités d’apprendre à connaître, à admirer et à respecter Mr. Marc Ls. Bazin, ce monument de la nature qui rassemblait en sa personne une énorme capacité analytique, une similaire aptitude de synthèse, une intelligence naturelle des théories et pratiques de la science économique, ainsi que de leur applicabilité générale ou limitée dans l’explication des faits et évènements économiques en Haïti, et enfin, une remarquable simplicité de langage qu’il savait bien mettre au service d’une formulation intelligible pour tous des problèmes économiques, politiques ou sociaux les plus complexes. Ma collaboration avec Mr. Bazin fut largement facilitée, je crois, non seulement par une convergence de philosophie politique, mais aussi par une affinité d’intelligence économique qui reconnaît au mécanisme des prix du marché libre une fonction essentielle de réallocation continuelle des ressources économiques vers les activités auxquelles une société libre accorde les plus grandes valeurs, et qui aussi voit dans le marché économique une des plus importantes institutions de la liberté. Ce qui nous unissait aussi était ce credo dans la nécessité de « miser sur l’homme », c'est-à-dire dans cette croyance bien raisonnée qu’il fallait viser le développement humain le plus large, pour que les bénéficiaires de la transformation économique et sociale, par l’accumulation des richesses et la démocratie, en soient à la fois les sujets, les acteurs, ainsi que la grande finalité.
Fort de ses profondes convictions philosophiques, économiques, politiques et démocratiques, Mr. Marc Ls. Bazin reconnaissait aussi l’impérieuse nécessité de promouvoir et réaliser la cohésion du tissu social Haïtien par le dialogue permanent et la concertation. Connaissant bien la nature de ses propres idées, des thèses qui leur sont contraires, ainsi que de leur évolution dans la quête humaine du savoir universel, Mr. Marc Ls. Bazin pouvait partir à la conquête des vieux démons de nos divisions politiques en identifiant clairement les espaces de compréhension mutuelle et de désaccords profonds, idéologiques ou autres, ainsi que les intérêts et contraintes de chaque acteur politique, incluant le gouvernement, chacun dans sa démarche individuelle visant à tirer le drap de son côté et/ou satisfaire sa propre chapelle ou base politique. Dès lors, il s’ingéniait à présenter des propositions qui reconnaissaient les besoins essentiels de chacun, ainsi que les intérêts du peuple Haïtien, facilitaient une sortie de crise sans que qui que ce soit n’ait à perdre la face, tout en faisant aussi ressortir clairement les coûts politiques, économiques ou sociaux de tout échec du processus de dialogue et de son fruit, la concertation, autant pour le pays que pour les protagonistes eux-mêmes.
Tout naturellement, c’étaient-là les démarches d’un homme qui s’était proposé de travailler à instaurer la démocratie en Haïti, et qui nous montrait à nous du MIDH, à notre peuple tout entier, à la classe politique, aux comédiens qui se disent être un gouvernement, et à notre jeunesse plus particulièrement à laquelle il ambitionnait d’inculquer aussi « les vertus du corps, les vertus de l’engagement, les vertus du mérite », la voie royale qui devra conduire notre pays à la pleine réalisation de son potentiel. Les pierres dont est pavée cette voie royale sont la démocratie, la liberté économique, le mécanisme des prix du marché économique, la création d’une richesse mieux distribuée, et l’état de droit, pour vivre ensemble et construire ensemble, dans un dialogue permanent et dans la concertation.
Au nom de ces principes du dialogue permanent et de la concertation, et fidèle à son engagement de servir son pays « en tout temps, en tout lieu et en toutes circonstances », Marc Ls. Bazin prit l’initiative de créer « l’Alliance Nationale pour la Démocratie et le Progrès » avec le Panpra de Mr. Serge Gilles et le MNP-28 de l’ingénieur Dejean Bélizaire, pour les élections générales de 1990. Au cœur de la crise politique du début des années 90s, Marc Ls. Bazin accepta le poste de Premier Ministre et travailla avec les militaires, pour « combattre l’embargo » infligé à notre petite économie forcer le retour en Haïti de Mr. Aristide, et on le retrouvera quelques années plus tard dans un poste de Ministre au sein d’un gouvernement dirigé par Mr. Aristide, encore pour travailler « contre un autre embargo » qu’on voulait imposer cette fois-ci au gouvernement de ce dernier. Au nom de la démocratie, du dialogue et de la concertation, on le retrouvera une autre fois Ministre des Négociations, pour tenter de trouver une entente salutaire pour le pays au conflit opposant Mr. Aristide, l’OPL et la Convergence Démocratique. Aux présidentielles de 2006, il sera le candidat d’une nouvelle alliance dénommée « Union pour Haïti », née d’un rapprochement entre le MIDH et Fanmi Lavalas, encore une fois au nom du dialogue permanent et de la concertation, qui seront aussi les motifs de sa participation recherchée à un colloque réunissant en 2009, à Santo Domingo, un groupe restreint d’activistes Haïtiens qu’il a su honorer également par une contribution écrite très pertinente sur les besoins économiques de notre pays.
Si, face à une armée étrangère au service de l’esclavage, l’armement de guerre et le courage du marron inconnu étaient indispensables aux meurtriers combats que devaient livrer nos pères et mères fondateurs « pour nous créer une patrie où le nègre Haïtien se sent réellement souverain et libre », pour le combat du développement économique et du progrès social, à l’heure mondiale de la globalisation, de la compétitivité économique accrue et de l’internet, des nouveaux défis qui appellent à la solidarité de tout le genre humain, les armes de la démocratie triomphante des tares économiques et sociales demeurent celles que privilégiait Mr. Marc Ls. Bazin, le dialogue permanent et la concertation, avec lesquels il nous exhortait au MIDH de « faire de la politique pour servir le peuple, et ne jamais se servir du peuple pour faire de la politique. »
Enfin, après des livres comme « Un Programme d’Action pour l’Avenir », après « Miser sur l’Homme », après « Le Défi Démocratique », après « Sortir de l’Impasse », après « Démocratie sous Pression », ou encore des articles comme « Des Idées pour l’Action » écrit tout récemment pour Le Nouvelliste, on reconnaîtra que le dialogue permanent et la concertation sont toujours demeurés au cœur de la méthode de Marc Ls. Bazin, comme outils d’une praxis démocratique visant à transformer l’état et l’économie de notre pays au bénéfice de notre peuple. Comme il le rappelait lui-même de temps en temps à certains critiques qui ne soufflaient d’ailleurs que du vent, mais qui dit mieux ?
Pilate aura beau se laver les mains, toujours on dira : « il a souffert sous Ponce Pilate. » De cet homme vertical, honnête et intègre, aux manières princières, aux actes courageux, qui eut à dire un jour : « je n’ai jamais rencontré un seul défi que je n’aie éprouvé le besoin de relever », la postérité répètera toujours après lui et avec lui, ses propres mots, pour affirmer :
« Bazin : ni voleur, ni assassin, ni ignorant, il a tout donné, il a beaucoup reçu. »
Pour avoir rencontré et connu notre Marc Ls. Bazin national, et parce que j’ai beaucoup reçu de lui, je suis un meilleur homme aujourd’hui. Et, parce que sa vision était juste, et son travail si laborieux, si riche et désintéressé, je peux déjà voir se dissiper les ténèbres dans mon pays.
Merci, et adieu Mr. Bazin.
Que Dieu vous garde dans la paix de sa demeure.
Que la lumière éclaire Haïti toute entière !
A la veuve de Marc Ls. Bazin, à tous ses proches, alliés et amis,
A Mr. Patrick Michel, et à tous les autres collaborateurs de Marc Ls. Bazin,
A tous les membres de cette grande famille politique que demeure le MIDH,
A tous ceux qui ont cheminé et travaillé avec le fondateur du MIDH,
J’offre mes sincères condoléances.
Parnell Duverger
20 juin 2010
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