Professeur Gérard Bissainthe
gerardbissainthe@gmail.com
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26 novembre 2010
Comme les prochaines élections présidentielles d’Haïti auront lieu sous les auspices d’une occupation étrangère illégale qui ne dit pas son nom, je ne participerai pas à la consultation électorale de dimanche. Si j’y participe, je pense que mon exemple pourra contribuer à faire croire au peuple haïtien que ces élections sous occupation étrangère constituent une amorce de solution à notre marasme qui ne fait qu’empirer chaque jour, alors que le mal lui-même est l’occupation étrangère.
D’ailleurs la participation dont je parle ne pourrait être que virtuelle ou morale en quelque sorte, car même si je voulais aller déposer mon bulletin pour le candidat ou à la candidate de mon choix, je ne le pourrais pas, étant donné que je vis aujourd’hui à l’étranger, dans ce que nous appelons la Diaspora Haïtienne, et aucune disposition n’a jamais été prise pour que les Haïtiens de la Diaspora puissent voter.
Ancré sur un engagement d’au moins un demi-siècle dans la lutte en Haïti ou dans l’exil pour une Haïti meilleure, je réaffirme ma conviction que notre pays ne pourra sortir de son capharnaum qu’aux conditions suivantes:
1.- L’ARMEE NATIONALE INDIGÈNE
La remise sur pied inconditionnelle et dans les meilleurs délais des forces armées (Armée et Police) indigènes, comme l’exigent notre Constitution et notre histoire.
2.- LA DECENTRALISATION “MUNICIPALISTE”
Une décentralisation administrative qui mette fin en Haïti dans les meilleurs délais au suzerainisme féodal du pouvoir central souvent désigné par l’expression “la République de Port-au-Prince”. Cette décentralisation a été vulgarisée dans les médias haïtiens par le mot “municipalisme”.
3.- LA MONONATIONALITE TERRITORIALE
La reconnaissance immédiate sur le territoire haïtien de la nationalité haïtienne pleine et entière des citoyens qui ont une nationalité haïtienne d’origine et qui jouissent en même temps d’une ou de plusieurs nationalité(s) étrangère(s), quitte à ce que des conditions circonstancielles soient établies par le Législateur pour protéger la souveraineté de la nation haïtienne.
Etant donné que les “multinationaux” constituent le fer de lance, le noyau central et la locomotive de la Diaspora haïtienne, cette “mononationalité territoriale” est la seule et unique manière de libérer les forces puissantes actuellement bridées et désamorcées de cette Diaspora haïtienne qui est le deuxième pôle essentiel de notre nation haïtienne devenue aujourd’hui une nation pleinement bipolaire.
Pour sortir des impasses routinières de notre politique, j’ai lancé avec des citoyens dont la majorité se trouve dans le pays intérieur, un mouvement qui a pour nom RACINE, sigle de “RAssemblement des CItoyens pour un Nouvel Etat” et dont l’objectif est de rassembler tous les citoyens haïtiens de l’intérieur et de la Diaspora qui veulent travailler à changer les structures de base du pays de manière positive. Nous le ferons de la manière suivante.
1.- Nous éviterons l’inféodation organique ou l’opposition systématique à quelque instance que ce soit, nationale ou internationale.
2.- Nous appuierons toutes les actions et initiatives utiles au pays d’où qu’elles viennent, de manière circonstancielle.
3.- Nous viserons à donner à tous les citoyens haïtiens la possibilité de faire dans les consultations électorales des choix personnels, conscients, libres et responsables, ce qui est la seule manière pour le peuple haïtien d’accéder au pouvoir réel et non à celui fictif et oligarchique du système actuel.
4.- Nous instaurerons avec les instances internationales, de préférence celles qui sont décentralisées, des échanges toujours transparents qui évitent le parasitisme que crée l’assistanat et qui établissent avec ces instances internationales des relations conviviales, partenariales, synergétiques, paritaires.
5.- Nous viserons à resserrer les liens qui doivent unir la “Famille Panaméricaine” sans anathème d’aucune de ses composantes.
Ayant eu l’honneur et le plaisir de recevoir en 1989, en ma qualité de Commissaire Général aux Haïtiens d’Outre-Mer, la médaille de la ville américaine de Houston, Texas et de recevoir récemment la médaille de la ville du Pradet dans le Midi de la France, j’estime que j’ai un devoir particulier de travailler à resserrer les liens spéciaux qui doivent exister dans ce que j’appelle le “Triangle Révolutionnaire Atlantique”, à savoir la Révolution Américaine de 1776, la Révolution Française de 1789 et la Révolution Haïtienne de 1804, qui sont les trois révolutions-phares du monde occidental et dont Haïti par son histoire est en quelque sorte l’interface. Pour le bien même de toutes les parties concernées, je mets ainsi au cœur de mes préoccupations et de mes objectifs personnels, par delà les divergences épisodiques éventuelles, l’ouverture aux courants culturels de la République Étoilée, de la France, des courants qui, joints à ceux de l’Afrique et de l’Amérindie, sont intégrées de manière prioritaire dans la substance même de notre nation.
En 1987, alors que je dirigeais le Bureau Politique du F.N.C. (Front National de Concertation), j’ai connu l’épreuve, après le carnage de la Ruelle Vaillant, d’avoir à décider avec le Bureau Politique, et ce ne fut pas de gaîté de cœur, d’arrêter la participation du FNC à ces élections pour éviter un bain de sang. Je forme le vœu que les instances en présence aujourd’hui évitent tout affrontement meurtrier qui de toute façon ne pourrait qu’affaiblir la communauté haïtienne dont toutes les composantes doivent au contraire unir leurs forces pour combattre l’ennemi commun qui est la Tutelle, une tutelle dont les vraies caractéristiques sont qu’elle nous a apporté trois choses qui n’existaient pas avant la Minustah, à savoir les galettes de terre, les kidnappings et, d’après certains observateurs, maintenant le choléra.
Puisque cette Tutelle existe, le pouvoir qui sortira des urnes dimanche, ne pourra être qu’un pouvoir subsidiaire, pour ne pas dire même un pouvoir de façade. Pourquoi finalement se déchirer pour un mirage ? Alors qu’en se mettant tous ensemble, on peut simplement avec un NON collectif donner congé, sans coup férir, aux forces d’occupation qui ne sont là que pour perpétuer et renforcer dans le pays la mainmise politique et économique d’une minorité sans racines solides et profondes dans les bases de la nation.
A ceux qui se posent la question de savoir quelle est à mon avis la personne sur la liste des candidats à l’élection présidentielle la mieux qualifiée intellectuellement et susceptible de projeter la meilleure image du pays aux yeux des étrangers, ma réponse est incontestablement Madame Mirlande Hyppolite Manigat. C’est tout ce que je puis dire dans un contexte de Tutelle, où d’ailleurs la Diaspora haïtienne dans laquelle je vis actuellement et que j’ai toujours défendue est pratiquement et même cyniquement amputée de son devoir et de son droit d’aller exprimer sa volonté par les urnes.
Par contre moi-même et le mouvement RACINE restons ouverts pour un dialogue demain avec le vainqueur des élections, un dialogue qui sera centré essentiellement sur les possibilités de travailler ensemble en vue d’implémenter les trois points ci-dessus mentionnés qui sont l’axe autour duquel pivote toute notre action politique présente et future.
La libération et le bonheur d’Haïti sont nos deux étoiles.
Salut et Fraternité
Gérard Bissainthe
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